Le Masque du Lièvre
par Evan John Jones
Trois
traditions magiques se rejoignent dans le masque du Lièvre.
Il y a tout d’abord l’animal mystique sacré de la Déesse Lunaire. Il y a ensuite
le lièvre « fou » de mars, qui fait référence à la folie sous une forme magique
ou prophétique. Il y a enfin le concept de la métamorphose avec une référence
spéciale aux Druides et à l’une des formes que la sorcière était supposée
prendre pour se rendre aux réunions de son coven. Ces trois aspects se combinent
pour accoucher d’un aspect particulier du Lièvre sacré.
Le lièvre est ainsi considéré comme un animal sacré
de la Déesse, sous son apparence de Diane, Déesse de la chasse (manger du lièvre
a toujours était tabou pour les celtes).
De même lors des anciens rassemblements sorciers, manger du lièvre était et est
toujours, à ma connaissance, tabou.
Je n’ai jamais rencontré personne, ni travaillé avec quelqu’un, qui accepterait,
même en rêve, de chasser et de tuer lièvre ou d’en manger.
Même de nos jours dans certaines cultures on dit qu’une personne folle a été
touchée par le doigt de Dieu et que tout le monde doit donc s’employer à ce
qu’il ne lui arrive rien de fâcheux.
En Europe on dit que la lune peut rendre les hommes fous, l’expression «
lunatique » désigne ceux que la lune ou la Déesse lunaire a rendus fous. Il y a
plus d’une once de vérité dans cela si l’on songe à cette forme de folie
inspirée par la Déesse qui touche les gens lors de rencontres. Très souvent ce
que dit une personne dans cet état d’extase religieuse peut sembler vide de tout
sens mais parfois il en sort quelque chose qui est de l’inspiration pure où la
personne commence à prophétiser certains événements futurs avec moult détails
puis soudain retourne à sa confusion. Ce que cette personne a prédit se révèlera
exact avec une précision folle. Dire qu’on est aussi « fou qu’un lièvre de mars
» n’est basé sur rien d’autre que sur l’extravagance avec laquelle les lièvres
ont coutume de se courtiser et de s’accoupler, ce qui à la lueur de la pleine
lune ressemble pour partie à un combat et pour partie à une danse rituelle en
l’honneur de la Déesse Lunaire.
L’autre particularité du lièvre est le fait qu’il n’a pas de maison (ni terrier
ni tanière), même lorsqu’il donne naissance à ses petits, le seul abri dont il a
besoin ce sont de hautes herbes ou d’autres feuillages. Contrairement au lapin
dans ses fourrés, il n’y a pas moyen de piéger le lièvre avec un furet. Le
lièvre est à un moment à un endroit dégagé et au moment suivant il n’est plus
là. Il semble venir de nulle part et le moment suivant il disparaît à nouveau.
On ne s’étonnera donc pas que le lièvre soit devenu le symbole de l’esprit du
chaman / magicien qui prend l’apparence d’un animal qui disparaît lorsqu’on le
voit puis qui revient sous forme humaine.
Après tout, sous sa forme animale, une personne capable de faire cela n’a pas
besoin de domicile, ou bien ?
Connaissances et superstitions se sont développées autour du lièvre et de son
association avec la Déesse et les esprits de l’Autre Monde. Malheureusement, la
plus grande partie de ce savoir ne nous est pas parvenu. Tout ce qui reste ce ne
sont que quelques vagues insinuations et références compilées à partir d’écrits
tirés des anciennes traditions. Ce que nous devons faire maintenant est de
réveiller l’ancien esprit du Lièvre et à partir d’une réévaluation de ce qui
subsiste d’un corpus d’indices lui créer un rôle moderne dans un corpus de rites
modernes.
Comment voyons-nous le rôle du Lièvre aujourd’hui ? Très mal si on veut donner
au Lièvre un rôle important ou une signification ésotérique dans la hiérarchie
des danseurs. Avec une approche normale, le lièvre devrait juste être un danseur
parmi les autres.
Le rôle du Lièvre est adapté à quelqu’un de « sensible ». Par le mot « sensible
» je veux désigner quelqu’un qui a la faculté et la capacité de paraître tirer
des informations de nulle part, d’une manière positivement impossible à
comprendre. C’est ce genre de personne qui arrive assez bien à symboliser ce que
le concept du lièvre devrait être une fois transposé en termes humains.
Ce n’est pas l’entraînement ou l’étude qui peuvent créer cette faculté, ou le
danseur l’a ou il ne l’a pas. Les autres doivent espérer que parfois la personne
qui a reçu le masque du Lièvre les surprendra soudainement lors du rite.
Aussi imprévisible que cela puisse paraître dans la mesure où c’est le Lièvre
qui conduit le rite, le rituel conserve sa trame de base… les autres danseurs
doivent suivre le Lièvre car le danseur Lièvre tiendra compte du rôle
traditionnel de chacun.
Si le groupe a reconnu le Lièvre dans son vrai rôle. Le Lièvre a toujours été le
solitaire qui s’est dédié à la Déesse d’une façon plus personnelle que les
autres membres du groupe. Le Lièvre est sur terre le serviteur de la Déesse et
c’est à Elle et à Elle seule que s’ouvre le Lièvre. C’est Son inspiration qui
guide le Lièvre dans un travail qui ne fait pas partie d’un travail normal: Là
où il y a un vrai Lièvre, il y a un instrument de la Déesse qu’elle peut
utiliser pour guider le groupe dans une union mystique de la pensée et de
l’esprit entre la Déesse et Son groupe. Ceux d’entre nous qui ne sont pas «
sensibles » et ne peuvent donc pas être le vrai Lièvre doivent accepter ce qui
est le mieux pour eux et honorer le danseur Lièvre, tout en réalisant que le
lièvre ne connaît pas de limite. Dans ce cas le Lièvre devient un symbole de la
réalité qu’il aurait pu être dans d’autres circonstances. Ainsi en réalité, dans
la plupart des groupes, le danseur Lièvre est l’un des 13 danseurs et le symbole
extérieur de ce qui fut une tradition spécifique dans les rites masqués. Le
Lièvre est le Lièvre et il est totalement imprévisible. Un jour la Déesse
inspirera le Lièvre et il remplira son rôle traditionnel. Elle le prendra par la
main et le guidera, et ainsi Elle guidera le reste du groupe dans un acte de
dévotion qu’Elle aura choisi.
Le Cercle de la Pierre Sorcière Wica et Sorcellerie