Le Masque du Bélier
par Evan John Jones
Sur de nombreux points, le mythe du
bélier s’est mêlé et entrelacé avec celui du chevreuil dans le bosquet. Il y a
aussi un amalgame de fait avec le personnage de Pan aux pieds de bouc qui sont
deux symboles interchangeables sur le plan mythologique.
Quel est donc le rôle du Bélier dans les Rites ? En remontant la pendule du
temps et en observant le passé, en particulier, les racines du mythe du Roi
Divin sacrifié et la manière dont il a influencé l’ancienne sorcellerie
Anglo-saxonne, notre vision du bélier devient plus précise. Le bélier n’est
autre qu’un nouveau substitut pour le concept du sacrifice du Roi Divin que l’on
retrouve dans l’ancien substitut au prix de sang payé tous les sept ans par le
Magister du Coven.
Dans l’aspect le plus ancien du concept du bélier, nous voyons l’animal puissant
et viril se battant pour préserver sa domination sur les femelles du troupeau de
la même façon que le Roi Cerf se bat pour préserver et maintenir ses droits sur
les biches du troupeau. Au lieu de se passer dans la nature sauvage, cela se
passe dans un monde semi-domestiqué des moutons appartenant à la communauté.
Transposé en termes d’un culte de fertilité, vous avez le Roi Bélier dont la
force et la virilité font se multiplier le troupeau. Plus il est vieux, plus il
est défié
Jusqu’à ce qu’il ne soit plus assez puissant pour contrer les attaques des
béliers plus jeunes – en bref le jeune Roi Cornu surclassant le vieux Roi Cornu
du sacrifice de Walpurgis. Même s’il y a eu un changement de l’ancien au
nouveau, ou peut être à cause de ce changement, le troupeau, ou le clan en
termes humains, est plus fort car il compte plus de membres. Une fois encore,
tout tourne autour du vieux concept de la force d’un groupe que l’on juge selon
celle de son chef. Aussi longtemps qu’il était fort, le groupe était fort.
Lorsqu’il s’est affaibli, le groupe en a fait de même. C’est à partir de cela
que le concept du sacrifice du chef ou du Roi a pris forme, car le laisser
vieillir en conservant sa charge ferait en une forme de magie sympathique que la
tribu ou le clan s’affaiblirait de la même façon.
Bien sûr la Déesse et les anciens Dieux conservent leur dû sous la forme d’un
sacrifice de sang. Une vie en échange de la bénédiction de la vie et de la
prospérité du clan. Quelle meilleure façon de payer ce dû qu’avec un bélier,
symbole de Dieu Cornu et qui a vécu une vie en accord avec la pensée
magico-religieuse de l’ancienne société. Le bélier a un double emploi. D’un côté
une forme de vie qui symbolise une manifestation du Dieu. Ainsi le bélier peut
être dédié aux Dieux à la place du chef toujours robuste. Il est tué et la part
du Dieu sera consommée dans les flammes du feu sacré. Le reste de la carcasse
sera cuisiné et sera servi lors de la fête où une partie du corps de l’ancien
Dieu Vivant sur Terre, sera rituellement consommée. Les prêtres et les anciens
du Clan recevront leur part du courage et de la sagesse du roi, transférée
magiquement dans le corps du bélier qui sera ainsi consommé en même temps que la
viande. La tribu ou le clan a toujours un chef fort et viril qui en plus a
l’avantage d’avoir un an de plus et d’être plus sage d’une année. Ainsi les
obligations religieuses sont remplies sans qu’il ait été nécessaire de sacrifier
la vie d’un homme.
Dans le même esprit le crane du bélier mort devient un symbole totémique du
clan. Comme c’était un symbole des Dieux, très souvent le crâne était enterré à
l’entrée du Cercle et il devenait ainsi le gardien rituel du Cercle. Le
sacrifice aux portes du site sacré où les prêtres du groupe se rassemblaient
pour l’adorer et se retrouver face à face avec la Déesse et les Dieux sous une
forme spirituelle chamanique.
De ces pratiques vient la tradition Sorcière qui veut qu’on n’a « rien sans rien
». Quoi qu’une personne retire de la sorcellerie, un doit être payé en échange.
En d’autres termes, vous prenez quelque chose et vous donnez quelque chose en
échange. Ce peut être de laisser une petite pièce lorsqu’on coupe un bâton de
frêne jusqu’au concept plus formel du sang subtitutionnel versé tous les sept
ans au terme du mandat du magister d’un coven. Là encore le sang du magister du
coven représente le même symbole que celui du sang du Roi Divin Sacrificiel.
Lorsque la royauté et la prêtrise ont évolué vers deux fonctions différentes, le
rôle des prêtres a changé. Le chef est devenu celui qui incarne le Dieu sacrifié
dans le groupe et le substitut de l’ancienne divinité, même si le concept du
Sacrifice du Roi Divin est tombé en désuétude.
Ce qui se passait c’est que le Magister du coven devait s’offrire lui-même en
sacrifice tous les sept ans dans l’esprit du concept du Roi désigné pour une
période sept années. Ensuite le concept du bélier comme sacrifice identifiable
et acceptable est arrivé. Tous les sept ans le chef du coven choisissait un
bélier et lui donnait son propre nom, lui remettant ainsi ses pouvoirs. Comme
prêtre des rites il devait ensuite sacrifier le bélier pour donner le sang qui
lui était réclamé en payement de sa prêtrise.
De nos jours, en nous souvenant du bélier et de sa place dans les rites, nous
nous détournons de l’aspect sacrificiel de l’animal et regardons plutôt la
signification symbolique du bélier.
Le magister n’a plus à offrir de sang en paiement à la fin des sept années. Au
lieu de cela il prête à nouveau le serment lié à sa fonction car il en a été
jugé digne. Plutôt que de voir le bélier comme un animal à sacrifier, nous
devons voir le masque du bélier comme un des masques des Dieux qui, pour
l’humanité, symbolisent la forme physique d’un concept abstrait qui peu à peu
s’est fait connaître à nous sous forme du mythe des Dieux. Pour cette raison, le
Bélier a sa place dans les rangs des adeptes masqués de la Déesse.
Le Bélier est maintenant un des masques à travers lequel les Dieux peuvent
parler et celui qui porte ce masque est parfois, lors de la transe, le véhicule
de l’ancienne sagesse de la Déesse qui nous est donnée en héritage.
Le Cercle de la Pierre Sorcière Wica et Sorcellerie