Le Masque du
Cygne
par Evan John Jones
Souvent on a l’impression que le
masque du Cygne est la note discordante dans le groupe des masques. C’est un
choix tout à fait délibéré car même si le cygne n’est pas un oiseau magique
selon la vision des sorcières, il dégage tout de même une impression de magie.
Deux éléments vivent de concert dans le mythe du Cygne magique. Il rappelle ce
qu’on nomme le crépuscule des anciens dieux d’Irlande et l’arrivée de la
nouvelle foi chrétienne.
Comme le raconte la légende, un saint chrétien a brisé le sort jeté sur les
enfants cygnes de Lêr par leur belle-mère Aeife les libérant ainsi d’un sort
païen. Comme il est de coutume dans les anciennes légendes, les anciens Dieux
sont vus sous une apparence humaine plutôt que sous une vague forme de puissance
omnipotente. C’est aussi le cas ici dans cette histoire qui parle du Dieu de la
mer Lêr, un habitant du tertre de Fionmachaidl ou de la colline du Champ Blanc.
Après la mort de son épouse bien aimée, Bobd le Rouge, roi de tous les Dieux
d’Irlande a envoyé à Lêr un message dans lequel il lui offrait une de ses sœurs
de lait en mariage. Lêr a choisi Aebh la plus âgée des sœurs de lait comme
épouse. Quatre enfants sont nés de cette union, la première, une fille, fut
appelée Finola, le second un fils Aed.
La naissance des deux autres enfants, les jumeaux Fiachra et Conn tua par
malheur Aebh.
Une fois encore, en signe d’amitié, Bobd le Rouge offrit à Lêr une de ses sœurs
de lait pour épouse. Cette fois Lêr choisi la seconde plus âgée Aeife. Le
mariage fut tout d’abord heureux mais rapidement les choses se dégradèrent
lorsque Aeife découvrit qu’elle était stérile alors que les enfants de sa soeur
de lait grandissaient et étaient chéris par Lêr et par le peuple de la Déesse
Danu. Aeife comme toutes les belles-mères des contes de fées voyait les enfants
comme un obstacle entre elle et son époux. Tout d’abord elle espéra que la mort
des enfants soit proche, ensuite elle a essayé de les faire assassiner par ses
serviteurs, mais ils ont refusé de s’exécuter. Il ne restait plus qu’une
solution à Aeife : utiliser la magie à l’encontre des enfants.
Elle a emmené les enfants se baigner dans les eaux de Lough Derravargh et leur a
jeté un sort puis les a touchés de sa baguette druidique ce qui les transforma
en cygnes. Tout ce que ses pouvoirs magiques ne lui permettaient pas de faire
c’était de les priver de leur pouvoir de parler et de réfléchir.
Aeife malgré les menaces de son époux et de Bobd le Rouge refusa de défaire sa
magie, mais elle révéla combien de temps les enfants garderaient l’aspect de
cygnes :
Pendant 300 ans ils vivront sous l’apparence de cygnes sur la mer de Moyle, puis
pendant 300 autres années sur Irros Doonann.
Pour toute consolation ils conserveront leur esprit humain et leur voix. Ils ont
ainsi chanté les plus beaux chants que le monde n’aie jamais entendu.
Aeife de retour chez Lêr lui a raconté que les enfants s’étaient noyés, mais Lêr
ne l’a pas crue et est parti jusqu’au lac où il a entendu les quatre cygnes qui
conversaient entre eux de leur voix humaine. Ils ont reconnu leur père et lui
ont raconté ce qui s’était passé et l’ont supplié d’utiliser sa propre magie
pour défaire le sort qui leur avait été jeté.
Ni Lêr ni Bobd le Rouge – même en étant le Roi des Dieux – ne pouvaient défaire
le sort. Tout ce qu’il pouvait faire c’était de punir Aeife pour sa traîtrise en
lui faisant dire sous serment ce en quoi elle craignait le plus d’être
transformée. Ayant prêté serment elle fut obligée de répondre et Bodb le rouge,
d’un coup de baguette, l’a transformée en ce qu’elle craignait le plus de
devenir et elle s’est envolée, s’éloignant de la cour sous la forme d’un démon
des airs poussant des cris stridents.
Cette longue histoire qui raconte les tribulations des enfants se termine à
l’époque où St Patrick est venu en Irlande et en a pour toujours banni les
anciens Dieux. Lorsque les enfants de Lêr ont pu retourner dans leur ancienne
demeure, ils l’ont trouvée vide et désertée. Ils ont cherché longtemps leurs
proches mais en vain. Finalement ils ont abandonné l’espoir de les revoir et
sont retournés vers les Iles de Gloire où ils ont été découverts par St Coemhoc.
Après avoir entendu leur histoire il les a amenés dans son église et leur a
parlé de la nouvelle foi qu’il représentait. Convertis au Christianisme, ils ont
accepté d’être baptisés et d’être aspergés d’eau bénite, le sort d’Aeife fut
finalement brisé et les quatre enfants ont repris leur forme humaine, mais à
cause de leur grand âge, ils sont morts peu après et ils furent enterrés dans la
même tombe.
Nous avons dit plus haut que le masque du Cygne n’avait que peu de chose en
commun avec les autres masques sacrés. Si on étudie tous les éléments qui
composent le concept des rituels masqués. Nous voyons le Cygne / Prêtresse avec
sa Baguette Druidique, le sort magique jeté sur les enfants qui les transforme
en oiseaux alors qu’en même temps ils conservent la capacité de parler et de
penser comme les humains, la vieille idée selon laquelle une fois que le destin
d’une personne est tracé, les pouvoirs des anciens Dieux et même la Déesse ne
peuvent pas faire grand chose contre cela, et finalement cela nous rappelle la
punition qu’a reçue Aeife et nous apprend que celui qui se sert de la magie dans
un but personnel, peut parfois avoir à en payer le prix et que ce qui est
invoqué peut parfois revenir d’une manière inattendue.
Lorsque quelqu’un porte le masque du Cygne, cela implique que lors de la
pratique de la magie la sorcière soit certaine de ce qu’elle fait et de ses buts
et que ce qu’elle fait est bien car si l’on abuse de la Puissance cela peut
avoir et aura finalement un prix. Pour ces raisons, le masque du Cygne a sa
place dans les rites masqués et lorsqu’il s’agit d’acquérir du savoir et de la
compréhension, ce qui est le but premier lorsqu’on suit la Déesse.
Le Cercle de la Pierre Sorcière Wica, Wicca et Sorcellerie