Première à Robert Graves

par Robert Cochrane version française Tof

 

Cher Robert Graves

J’ai lu et relu votre livre, « La Déesse Blanche » avec beaucoup d’admiration, de stupéfaction et un peu d’effroi. Je vois ce que vous voulez dire lorsque vous parlez de travail d’inspiration et je réalise que cela a dû être le résultat de toute une « pression » intérieure puisque selon ma propre expérience, c’est comme cela que ça fonctionne. Cependant, je vais souligner d’autres facteurs qui pourraient vous intéresser dans la manifestation du « Déesse du Blé ».  Il y a certaines preuves à l’appui de la théorie selon laquelle des païens britanniques et français croyaient qu’il y a plusieurs étapes dans le développement spirituel et de la maturité et ils l’ont intégré dans leurs croyances religieuses. Il existe toujours en Bretagne un dolmen sculpté où l’on peut voir gravés tous les symboles et mystères des sorcières, surmonté d’une sculpture en ronde-bosse du Christ, que les archéologues décrivent comme une représentation de la Passion du Christ. Il date de 1674 et selon ce que je sais, (je viens d’une vieille famille sorcière et bien que les croyances de ma famille étaient moribondes à la naissance de mon père, j’en sais assez pour comprendre) la sculpture est tout sauf chrétienne. Sur cette sculpture il y a les huit cercles avec la mort qui soutient la Déesse cloche au-dessus d’eux. Ceux-ci, m’a-t-on dit, représentent les huit États ou mondes de la manifestation, et comme ils semblent correspondre à la psychologie jungienne qui est une reprise de la plupart des systèmes à Mystère, le reste est très intéressant. Il y a aussi d’autres facteurs liés à ce déploiement nonuple de l’esprit. Il existe entre autre un ancien manuscrit dans lequel un héros épique nommé Libius Disconis entreprend neuf aventures accompagné d’Ellen et d’un nain. Dans ces aventures tous les ennemis vaincus ont un véritable parfum mythologique, et bien sûr, Libius termine en libérant la Déesse sous l’un de ses aspects les plus périlleux, puis l’épouse. Il s’agit là de la progression de Tannhäuser dans sa forme originale. Le côté damnation m’échappe car je suis incapable de me décider s’il est saisonnier ou psychologique. J’aimerais savoir ce que vous en pensez. Cette histoire a l’avantage de comporter divers animaux tribaux et les héros du système druidique et elle peut éventuellement être une ouverture vers le mystère qui entoure encore une grande partie de l’iconographie de l'ancienne religion.

Par ailleurs, la bataille des arbres peut aussi être un système équivalent au système d’arbre de la magie du douzième siècle. Il y a de nombreux points communs entre les systèmes de méditation Hermétique et Kabbaliste et les arbres de Taliesin. Un de mes amis a affirmé l’avoir pratiqué, mais puisque cela agit sur les glandes endocrines du corps, personnellement, je ne vois pas comment c’est possible ainsi. L’arbre de vie kabbalistique ainsi que le livre de Thoth semblent dépendre plus d’Apollon que de la Déesse. Je pense que vous avez absolument raison quand vous dites qu’elle est la principale source d’inspiration.

Sincèrement,

      R. L. Bowers 

PS : Excusez-moi de vous avoir écrit, mais j’ai trouvé tant d’intérêt à la lecture de vos livres que j’ai presque l’impression que vous êtes un vieil ami.

 

 

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