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Voici le texte d’une conférence donnée par Gerald Gardner sur l’Ile de Man au dernier trimestre 1952.  

Sorcières
par Gerald Gardner version française
Tof

J’ai été invité par Sir Alexander Cannon à prononcer quelques paroles sur les sorcières. Or, comme l’a dit Joad, tout dépend de ce que vous entendez par sorcière. Le dictionnaire dit qu’une sorcière est une vieille femme qui a fait un pacte avec le diable et qui voyage dans les airs sur un manche à balai.
Je vous dirais ce que j’en pense en quelques mots, c'est-à-dire ce que l’agriculteur a déclaré dans la vieille histoire quand il a vu une girafe : « Un tel animal n’existe pas. » Aucune sorcière n’a jamais volé dans les airs, en tout cas pas avant l’invention des avions et elles n’ont jamais fait de pacte avec le diable ou avec quelqu’un d’autre. Il y a eu des sorcières à toutes les époques et dans tous les pays, c’est-à-dire qu’il y avait des femmes et des hommes qui avaient une certaine connaissance des philtres, des remèdes, des charmes, des potions d’amour, des sorts et des poisons. Avoir une connaissance des poisons ne signifie pas nécessairement que vous les utilisez, mais si vous savez comment sont fabriqués des remèdes, vous devez savoir lesquels sont inoffensifs et lesquels doivent être traités avec beaucoup de précautions et ne pas en donner avec excès, voilà ce qu’est la connaissance des poisons. On a aussi dit que ces personnes affirmaient, ou qu’on disait-elles, qu’elles étaient en communication avec le monde des esprits, les morts et parfois avec les petits Dieux.
A certaines périodes de l’histoire les Sorcières étaient très appréciées, à d’autres elles furent persécutées. Dans la Bible, nous avons l’histoire de la pauvre Sorcière d’Endor qui était persécutée et travaillait en secret quand toutes les autres avaient été bannies du pays. Nous avons aussi Houlda la Sorcière qui vivait à Jérusalem, elles était honorée et consultée par le roi sur des questions très importantes. Certaines sorcières étaient des gens simples, certaines étaient très instruites, certaines étaient autodidactes, certaines avaient hérité d’une longue tradition d’enseignement occulte, d’un type peut-être primitif, mais peut-être très répandu. Ce savoir est peut-être passé de Madagascar aux Antilles et en Amérique. Je suis un anthropologue et il est clair qu’un travail d’anthropologue consiste à enquêter sur ce que les gens font et ce qu’ils croient et non pas ce que d’autres personnes ou les moralistes disent qu’ils devraient faire et croire. Vous devez lire tout ce que les autres ont dit sur le sujet sur lequel vous faites des recherches, mais vous devez chercher à vérifier ce qui est dit et ne pas accepter aveuglément ce qui est dit sans qu’aucune preuve ne soit fournie surtout si cela va à l’encontre des preuves que vous êtes parvenu à réunir. Voilà la méthode que j’ai adoptée. Je pense que l’on peut diviser les écrits sérieux sur la Sorcellerie en trois catégories. Il y a tout d’abord les premiers livres écrits ou inspirés par l’Eglise, qui disent que les sorcières étaient des personnes abominables. Beaucoup plus tard il y a eu de nombreux livres prouvant que les sorcières n’ont jamais existé. Plus récemment de nombreux livres savants et fort pertinents écrits par le professeur Murray, Christina Hole, Arne Runeburg, et Penthorne Hughes ont prouvé qu’elles existaient. Ils l’ont prouvé en citant de nombreux écrits anciens et modernes. Mais si Christina Hole et M. Penthorne Hughes disent tous deux qu’ils connaissent des Sorcières qui vivent en Angleterre aujourd’hui, il ne semble pas qu’ils aient demandé à ces Sorcières leur avis sur le sujet. Et s’ils l’ont fait, leurs écrits ne le montrent pas. Je sais bien que les Sorcières ne vous diront pas grand-chose à cause de leurs vœux de secret et même s’il y a des choses qu’elles ne veulent pas révéler, elles ne cachent pas, par exemple, qu’il y a autant d’hommes que de femmes dans le Culte des Sorcières, mais comme la coutume veut que l’on parle de Sorcières, j’utiliserais ce mot pour parler des personnes des deux sexes. Dans la Sorcellerie, la femme a le dessus. Elle est la prêtresse, l’homme n’est que le prêtre d’une ancienne religion datant apparemment de l’âge de pierre et ayant étrangement survécu même si c’est dans une forme altérée.
A certains époques l’Eglise a ignoré les sorcières, mais quand la papauté fut solidement implantée, les Prêtres du Culte furent traités comme des rivaux que l’on déteste (et c’était bien le cas) et ils furent persécutés. Les puritains ont repris ce travail avec joie et ils ont pratiquement réussi dans cette tâche.
Dans le cadre de cette tentative pour faire disparaitre les Sorcières, toutes sortes d’idées fausses ont été propagées pour que quand on parle de Sorcière on pense à une vieille femme crasseuse sur un manche à balai au lieu des belles jeunes femmes qui dansaient au clair de lune et qui horrifiaient tant l’Eglise. Plus tard, ils ont dit que les Sorcières étaient très vieilles, mais que le diable les faisait paraître jeunes par magie. Mais si on se penche sur l’âge des victimes de la chasse aux sorcières on peut lire par exemple « brûlées deux jeunes sorcières âgées de 15 et 16 ». Quand ils ont brûlé la pauvre Margaret Ine Quane à Castletown en 1617, ils ont brûlé son jeune fils avec elle, avec pour seule accusation d’être son fils. Une Mme Holt a été pendue en Angleterre en 1722, il me semble, sa fille de neuf ans a été pendue avec elle, sans procès ni jugement. Ils savaient que les enfants étaient généralement initiés très jeunes, alors elle devait être une sorcière. Cela prouve, je pense, le mensonge qu’est l’histoire de la vieille sorcière, il y avait des sorcières de tout âge, mais les plus âgées et les plus fatiguées étaient plus faciles à arrêter et bien sûr, de nombreuses femmes sont mortes juste parce qu’elles étaient seules et que ces vieilles femmes avaient mauvais caractère et qu’elles dérangeaient leurs voisins. En plus, une femme, même jeune, qui a eu le visage lacéré par le fouet, le fer chauffé au rouge et subi la question, n’est pas au mieux de sa forme et fait peut-être plus que son âge.
Comme je l’ai dit, toute vieille femme qui parlait toute seule ou qui avait un animal de compagnie risquait d’être accusée, torturée, à moitié noyée, au grand amusement des spectateurs et souvent elle confessait tout. Une demi-heure sur le bûcher valait mieux que des semaines de tortures continues, c’est comme ça qu’on a vraiment commencé à croire à l’histoire de la vieille sorcière.
Au moins neuf millions de personnes sont mortes sous la torture d’une manière ou d’une autre, la plupart ont été brûlées. Les rares qui ont survécu sont passées dans la clandestinité et la dernière chose qu’elles veulent faire est d’en sortir. J’ai demandé à la première sorcière que j’ai connue : « Pourquoi garder secret tout ce merveilleux savoir, il n’y a plus de persécution de nos jours » et elle m’a répondu : « Il n’y a plus de persécution ? Si l’on savait ce que je suis, à chaque fois qu’un poulet meurt, à chaque fois qu’un enfant tombe malade dans le village, on me blâmerait, la Sorcellerie ne paie pas pour les fenêtres cassées. » C’était une femme très instruite, la sorcellerie est aujourd'hui pratiquement une société secrète propre à quelques familles. A l’époque des bûchers on ne pouvait pratiquement faire confiance qu’à ses propres enfants et ainsi l’ancien savoir n’a été transmis qu’à un très petit nombre de personnes et ce savoir devait être presque uniquement mémorisé.
Tout ce qui était écrit était très dangereux, si des écrits étaient trouvés non seulement vous, mais aussi toutes vos relations, amis et serviteurs pouvaient être torturés, car il est bien connu : « tu ne peux pas être une sorcière solitaire ». Tout le monde avait en tête « Ne trahis jamais personne, ne fais jamais rien qui pourrait causer des ennuis à un membre du culte, si tu es arrêté, si tu ne peux pas supporter la torture, avoue quelque chose qui les mènera sur une fausse piste, quelque chose qui te mènera à une mort rapide si c’est possible et détruis tout ce qui pourrait t’incriminer au premier signe de danger. Il en a résulté que bien que les choses soient souvent écrites de nos jours, une grande partie des rituels a été perdue et ceux que nous avons sont incomplets et différentes personnes ont apparemment comblé les manques afin de rendre les rites praticables. Ces transmissions, copies et interpolations successives ont sans doute préservé l’esprit des rites, mais ont au minimum modifié la langue et éventuellement les rites eux-mêmes, et il est au-delà de leurs compétences ou des miennes de déterminer ce qui est original et ce qui a été ajouté. Pour savoir en quoi consistaient ces connaissances, il m’a fallu prêter de grands serments et je les respecte. Je ne peux en parler qu’en termes généraux. Ce sont de toutes évidences ce qui reste d’une ancienne religion préchrétienne d’un type chamanique. Ils avaient des rites religieux pour le bien de l’Ame des défunts pour leur assurer une place convenable dans l’autre monde et faire qu’ils se réincarnent dans leur propre tribu ou dans le culte, au bon moment, car la seule chose qu’ils semblaient craindre était de renaître chez des étrangers. Et je peux le comprendre, je ne voudrais pas être réincarné derrière le rideau de fer ou dans une tribu en Afrique.
Ils avaient aussi des rites pour que leurs récoltes soient bonnes, pour avoir de nombreuses naissances dans leur bétail et leurs familles et faire que la tribu (ou le Culte) soit forte. En d’autres termes ils accomplissaient des rites de fertilité. La plupart des gens s’énervent lorsque je dis cela, mais pour moi il n’y a rien de mal à faire quelque chose en privé, pour le bien public, même si ce n’est pas tout à fait orthodoxe.
De nombreuses personnes essaient de me faire dire que les Sorcières utilisaient des crânes, des os, des yeux de grenouilles et toutes sortes de choses horribles. Tout ce que je peux dire, c’est que je n’en ai jamais vu ou entendu dire que ces choses sont utilisées. Pour être exact, je pense qu’autrefois ils utilisaient parfois un crâne et des os croisés pour représenter la Mort et l’au-delà, mais de nos jours la Grande Prêtresse se tient avec les bras croisés pour représenter le crâne et les os, puis elle écarte ses bras pour représenter le pentacle de la renaissance. A l’époque d’Henry VII et d’Henry VIII, tous les portraits comprenaient un crâne, c’était la mode à l’époque, et à l’époque les sorcières étaient elles aussi à la mode. Les diseuses de bonne aventure, les astrologues et ceux qui vendaient des charmes se devaient d’avoir des crânes exposés dans leur officine et ils le faisaient, mais peu d’entre eux étaient des sorcières initiées, il ne s’agissait que de commerce. Si une sorcière disait la bonne aventure, elle se devait de le faire comme les autres le faisaient.
Beaucoup d’autres personnes ont essayé de me faire dire qu’elles pratiquent la Messe Noire. D’après ce que j’ai compris, une Messe Noire est une parodie blasphématoire de la Messe Catholique Romaine qui doit être dite par un Prêtre Catholique, en général défroqué, qui consacre l’hostie et le vin (transforme les éléments en chair et en sang) puis les profane, faisant tout à l’envers.
La première chose que je veux dire très clairement, c’est qu’il y a une différence entre la Sorcellerie et ce que certains appellent la Magie Noire. La première différence est que la véritable sorcellerie (pas celle de l’herboriste de village ou de la diseuse de bonne aventure) est une religion avec ses propres Dieux et ses propres rites religieux. D’autre part, la sorcière croit que le pouvoir réside avec elle et que c’est en développant ses propres pouvoirs, en d’autres termes en se mettant en condition elle-même et d’autres membres du Culte que la Sorcière peut faire des choses et cela suppose qu’elle avait déjà un certain pouvoir au début ou qu’elle soit une sorte de médium. On a dit que le processus de conditionnement est une sorte de yoga, il s’agit d’agir sur le corps matériel pour agir sur le corps non matériel. Il n’est pas question de faire un pacte ou un accord avec qui que ce soit ou d’obtenir une aide extérieure, à l’exception de celle d’autres membres du Culte et certaines de leurs pratiques sont très similaires au spiritisme.
Leurs objectifs principaux étaient d’apporter la prospérité à la tribu ou au Culte, de guérir et il y avait aussi, bien sûr, le côté religieux, afin d’assurer une vie heureuse après la mort. La Sorcellerie est, ou devrait être, employée au profit des autres. Il est bien sûr possible d’en faire mauvais usage, les automobiles peuvent être utilisées pour vous transporter rapidement d’un lieu à un autre mais elles peuvent aussi être utilisées pour vous écraser, même si ceux qui ont construit ces voitures ne les ont pas faites dans ce but. La Goétie d’un autre côté consiste à invoquer des esprits, bons, mauvais ou neutres et leur dire de faire des choses. Ces pratiques sont généralement basées sur l’hypothèse que le Roi Salomon connaissait les mots de pouvoir et les rites pour appeler les esprits et les démons et les faire travailler pour lui. Ce n’est pas une religion, bien qu’il faille agir en se basant sur la connaissance des noms secrets de Dieu, auquel les esprits doivent obéir, presque toujours au bénéfice de celui qui invoque, soit directement, soit parce que quelqu’un lui verse des sommes importantes pour faire quelque chose. La Goétie est généralement pratiquée au détriment d’autres personnes, les avantages habituellement recherchés étant l’argent, le pouvoir, l’amour des femmes et le savoir. Un sorcier travaille généralement seul ou avec un compagnon (qui peut être n’importe qui) qui n’est là que pour tendre les objets nécessaires et entretenir les feux. Il commande et essaie de forcer les esprits à apparaître par des menaces. Seuls ceux qui sont invoqués sont censés venir, contrairement au spiritisme où l’on tente tout simplement de communiquer avec les esprits qui veulent bien venir. Il se tient au centre d’un cercle immense et compliqué, protégé par les noms de Dieu et des signes cabalistiques, parce qu’il croit que les puissances qu’il invoque sont très dangereuses, si ce n’est maléfiques et il n’ose pas quitter ce cercle avant d’avoir pratiqué un bannissement élaboré réalisé pour évacuer toutes les influences. Le cercle des sorcières est simple et il est surtout là pour contenir le pouvoir généré et l’empêcher de se dissiper. La Sorcière peut entrer et sortir librement du Cercle puisqu’elle n’invoque rien de maléfique ou de dangereux. Enfin, l’Eglise et les puritains, qui détestaient les Sorcières car elles pratiquaient une religion rivale alors qu’elle ne se préoccupait ou persécutait que rarement les sorciers. Beaucoup d’hommes d’Eglise pratiquaient la Goétie même si pour lui donner un air de respectabilité, ils y mêlaient parfois de l’astrologie, mais c’était normal puisque le Sorcier devait tenir compte des heures, des jours et des saisons.
Mais on disait que l’apprenti sorcier qui n’aurait pas le savoir ou le pouvoir nécessaire s’adonnait parfois à la Magie Noire ce qui impliquait de faire appel aux puissances du mal et faire un pacte avec elles, mais il est  difficile à croire que quelqu’un ait été assez fou pour cela. Comme je le dis dans mon livre à paraitre il y a des preuves montrant que de tels pactes étaient faits sur l’Ile de Man. L’Eglise ne tolérait pas cette magie et persécutait ceux qui s’y adonnaient. Elle les accusait des même crimes que les Sorcières et les torturait jusqu’à ce qu’ils les avouent. Le Sorcier avait une grande connaissance de la Kabbale Hébraïque, mais ça n’allait pas beaucoup plus loin. La Sorcière elle avait de grandes connaissances, sa religion et ses pratiques remontaient presque à l’Age de Pierre. J’ai demandé à la première sorcière que j’ai connue pourquoi elles utilisaient la main gauche là où l’on devait utiliser la droite et pourquoi elles avaient des bougies noires et des crucifix renversés sur l’Autel. Personnellement je n’en ai jamais vu ou entendu dire qu’une Sorcière en avait utilisés et les sorcières ont ri lorsque je les ai questionnées à ce sujet. Tout d’abord il est difficile d’imaginer qu’un prêtre catholique soit membre du Culte et en plus si vous ne croyez pas que les éléments sont consacrés comme il se doit il n’est pas possible de les profaner. Les sorcières n’ont pas de crucifix, inversé ou non lors de leurs réunions, elles ne font pas de geste spécialement de la main gauche ni rien à l’envers. S’il n’y a pas d’ampoule électrique, elles utilisent des bougies placées autour du Cercle pour s’éclairer, mais elles sont blanches et viennent de chez l’épicier.
Les Sorcières ne croient pas à la Messe, alors pourquoi devraient-elles la parodier ? Quelqu’un a-t-il déjà entendu dire que quelqu’un perd son temps à parodier une cérémonie Hindoue ou Musulmane ? Lors des réunions de Sorcières, elles ont leurs propres rites religieux à accomplir. Ensuite il y a un petit repas puis une danse. Elles n’ont pas de temps à perdre pour un non-sens blasphématoire. Je ne dis pas la Messe Noire n’a jamais été pratiquée, en février on m’a dit à Rome qu’il y en avait assez régulièrement, mais je n’avais pas de devises étrangères à gâcher pour cela, mais les gens qui sont censés y officier sont les prêtres et assurément pas des sorcières. En tout cas pas des Sorcières comme je l’entends, c’est-à-dire initiées aux Anciens Savoirs. Ils peuvent dire la bonne aventure ou vendre des philtres et des charmes entre deux Messes Noires, mais franchement je n’en sais pas plus à leur sujet.
Mes croyances peuvent choquer certaines personnes. Je crois qu’il y avait dans les temps primitifs des gens de petite taille, probablement assez proches des Finnois et des Lapons contemporains, qui avaient une religion Chamanique et qui avaient le don de double vue. Ils étaient répartis dans toute l’Europe, lentement ils ont été remplacés par des races plus grandes, mais quelques-uns se sont exilés vers des lieux où il n’y avait presque pas de nourriture. Ceux des races plus grandes allaient les consulter à cause de leurs pouvoirs magiques. Et certains d’entre eux se sont mariés avec des personnes des races plus grandes et leur ont enseigné leurs secrets et leur religion. Ou plus probablement une sorte de religion a émergé chez les Celtes faisant entrer les anciens Dieux de la chasse et de la fertilité dans le Panthéon Celtique, séparé tout d’abord, puis lentement, ils ont été identifiés les uns avec les autres, donnant à un Dieu unique les attributs des deux Dieux. Je ne peux pas vous donner leurs noms, parce qu’il s’agit d’un grand secrets, mais laissez-moi vous assurer qu’ils ne sont ni le diable ni des démons. Ce sont tout simplement des représentations des premières aspirations de l’homme primitif. La mort et la résurrection dans des circonstances heureuses (ou en d’autres termes la réincarnation), la fertilité, la chance, une bonne chasse etc. Il me semble que c’est aussi, en gros, ce à quoi aspire le chrétien moyen, peut-être dans une forme plus matérielle. Les Sorcières ne pensent pas que ces Dieux sont tout-puissants car le destin est plus grand que les Dieux, mais dans la mesure de leurs pouvoirs, ils aideront l’homme, si l’homme les aide en s’adonnant à des rites, des danses et assez bizarrement ils ne veulent pas de sacrifice ou de rétribution en échange. Je suppose qu’à l’époque le Druidisme était la religion principale et il est possible que la religion sorcière ait été méprisée parce que non conformiste, en particulier au sujet des sacrifices humains, etc, et de toute façon, elle concernait ces gens petits et mauvais qui vivaient dans des grottes et non pas les gens respectables, dont les prêtresses étaient trop libres, pratiquaient le spiritisme et la divination, vendaient des charmes et des philtres mais tout ceci n’ est que conjecture de ma part.
Lorsque le christianisme est arrivé, les sorcières furent jugées encore moins fréquentables et elles sont devenues plus secrètes. Les conciles des débuts de l’Eglise Chrétienne étaient pleins de dénonciations de ces cultes liés à Diane et aux fées, des païens des lieux retirés et souvenez-vous, la Cornouailles, la Grande Bretagne et de grandes parties des campagnes françaises et basques étaient encore païennes au douzième siècle. Dans d’autres régions, le petit peuple fut chassé lentement, ils restaient fidèles à leur ancienne foi et devenaient mendiants et voleurs, les privations ont fait que leurs enfants étaient plus petits encore. Ils trouvaient de l’embauche dans des fermes isolées et travaillaient en échange d’un peu de nourriture. Ils étaient farouches et nus et en général ils s’enfuyaient si le fermier tentait de leur faire porter des vêtements. Ces gens ne faisaient pas partie de ceux qui étaient initiés, mais ils possédaient quelques-unes des anciennes connaissances. Sur l’île de Man, ils enseignaient la clairvoyance en échange de petites rétributions.
Lorsque le Pape a soudain prêché une croisade contre eux il les a qualifiés de Sorcières et d’Hérétiques et ordonna de tous les exterminer. Ils étaient un peu comme les gitans et les étameurs deux cents ans plus tôt, quasiment une race à part avec sa propre langue, ses propres lois et ses coutumes. Le droit écossais est catégorique à ce sujet, ainsi la bigamie était un crime punissable de mort pour tout Ecossais mais pas pour les gitans et les étameurs et les gens de ce genre qui ont leurs propres lois et coutumes bestiales. Puis le Pape a tout à coup dit que toutes les Sorcières étaient des hérétiques et que tous les hérétiques étaient des Sorcières et qu’il fallait les exterminer.
Ces gens petits étaient en fait des voisins peu sympathiques, mais si vous les traitiez bien et si vous leur donniez de la nourriture et des petits cadeaux, ils pouvaient vous apporter leur aide lorsque vous en aviez besoin. Ainsi, au Pont des Fées, je pense qu’il est très probable que lorsque les défenseurs furent sur le point de perdre, les petits hommes locaux sont arrivés à leur secours et ont attaqué l’ennemi par le côté ou leur ont décoché des flèches empoisonnées, une attaque soudaine et inattendue qui a conduit à la défaite des assaillants. A Bornéo j’ai vu des hommes tués par des flèches lancées par une sarbacane pas plus grosse ni plus grande qu’une fine aiguille à tricoter. Quand ces dards ont volé autour de moi, je suis parti sans demander mon reste.
Lorsque le pape Innocent à soudainement prêché une croisade pour que tous les sorcières et les hérétiques soient exterminés, en disant que toutes les sorcières étaient des hérétiques et tous les hérétiques étaient coupables de sorcellerie, le petit peuple était une cible facile et ils furent massacrés en grand nombre, tout comme les sangs-mêlés, ceux que j’appelle les Sorcières. Il est significatif qu’ils vivaient souvent dans les parties les plus élevées du pays. Une des premières victimes, Lady Alice Kytler, de Kilkenney, dirigeait apparemment depuis de nombreuses années un Coven, célébrant les rites sans s’en cacher, l’évêque d’Ossery l’a fait arrêter et mener au Tribunal, mais il semble qu’on ait conclu qu’il n’y aucun crime à adorer les Anciens Dieux et à pratiquer la sorcellerie et elle a été acquittée. L’évêque, renforcé par une seconde bulle papale, a attaqué à nouveau, cette fois les nobles s’en sont mêlés et on enlevé Lady Alice Kytler par la force et l’on emmenée clandestinement en Angleterre. Pensant que les tribunaux l’avaient spolié, l’évêque s’est vengé en faisant flageller et torturer tous ses serviteurs et amis qu’il a pu attraper. Apparemment sans aucun jugement, par une sorte de lynchage ecclésiastique. Mais le Pape et les Evêques étaient tout-puissants. Une condamnation pour sorcellerie signifiait perdre tous ses biens au profit de l’Eglise et les informateurs recevaient une riche rétribution. Neuf millions de personnes ont été torturées à mort et ce qui subsistait du Culte est passé à la clandestinité. Je pense qu’il n’y a que peu de chance qu’un petit culte religieux s’il n’avait été que religieux ait pu survivre à une telle persécution sévère et de longue durée. Il est vrai que les Juifs l’ont fait, mais ils étaient des millions et ils n’ont pas été exterminés dès qu’ils étaient attrapés. Je pense que l’explication est que les sorcières avaient un secret et comme nous avons redécouvert plusieurs de ces méthodes auxquelles nous avons donné des noms bien compliqués mais pour la sorcière tout cela n’est que de la magie. La première loi est qu’il ne faut jamais rien dire ou faire qui puisse causer un problème quelconque ou mettre en lumière un frère ou une sœur, mais en signe de bonne volonté j’ai montré en confidence au Dr Cannon une lettre datée du 29 septembre 1952 me racontant une petite rencontre de Sorcières en août dernier. Elles ont tracé le Cercle, fait la danse de fertilité rituelle sur des balais et pratiqué les rites. Cette lettre mentionne aussi qu’elles ont essayé différents charmes qui semblent avoir fonctionné aussi qu’un remède merveilleux. Je connaissais l’état du patient et j’étais présent lorsque ce sort a été jeté en mars dernier, il y a tout juste six mois. Comme je l’ai dit, un anthropologue se doit d’observer et noter ce que font et croient les gens eh bien cette année ces personnes ont pratiqué la Sorcellerie et ils croient qu’ils ont réussi à accomplir ce qu’ils voulaient.
On ne peut pas dire que la guérison ne s’est faite que parce que le patient y croyait, car c’est en pratiquant les charmes de sorcellerie qu’une foi intense a été suscitée. Personne ne dira que les gens guérissent à Lourdes uniquement par ce qu’ils y croient. J’ai été à Lourdes, je n’ai vu qu’une seule guérison, mais j’ai revu le malade le lendemain et son état était encore pire qu’avant. Je ne dis qu’il n’y a là-bas jamais de guérisons définitives, je dis juste que je n’en ai pas vu une seule. Je ne dis pas que les guérisons causées par les sorcières sont permanentes, on ne pourra pas dire cela avant cinquante ans. Tout ce que je peux dire c’est que ces gens ont essayé un remède très ancien et qu’il semble avoir fonctionné.
J’ai aussi mes propres théories. Je pense que certaines personnes ont une méthode qui développe certains centres nerveux, ou chakra si vous voulez, dans leur corps. Par cette méthode elles peuvent faire agir certaines forces. Je pense que c’est quelque chose que n’importe qui peut apprendre s’il en a la capacité naturelle, mais il faut d’abord en avoir la capacité. Je pense que cette capacité est généralement héréditaire. L’Eglise et les puritains le savaient bien et c’est pourquoi ils ont brûlé les jeunes enfants avec leurs mères, en essayant d’exterminer ce pouvoir et sa connaissance. Je pense que ce n’était pas qu’une manifestation de cruauté barbare, je pense qu’ils avaient une raison d’agir ainsi mais leur raison était mauvaise.
Je ne pense pas que ce pouvoir est ce que j’appellerais surnaturel, il est tout simplement inhabituel et la méthode pour développer ce pouvoir est un secret qui ne vous est enseigné que lorsque vous êtes initié dans le Culte des Sorcières.
Je ne dis pas que seules les Sorcières possèdent ce savoir. A la base quelqu’un doit l’avoir découvert et l’avoir trouvé intéressant puis l’avoir pratiqué avec d’autres jusqu’à ce qu’ils s’y habituent et obtiennent ainsi des résultats, ce qu’une personne peut découvrir par hasard, une autre le peut également.
Un homme nommé Hughs a une théorie intéressante disant que cette méthode a été développée par les Prêtres en Egypte, de là elle est allée en Grèce, par les Mystères D’Eleusis, de là elle est passée à Rome, puis en Grande-Bretagne et la France, et aux sorcières. Par une autre voie elle a aussi remonté le Nil à travers l’Afrique, jusqu’aux sorciers d’Afrique Occidentale puis aux Antilles et en Amérique ce qui est devenu le Vaudou. C’est une théorie fascinante même si je ne vois pas pourquoi cette méthode n’a pas pu être découverte de façon indépendante en différents endroits.
D’autre part rien n’est impossible, les gens prennent ce qui les intéresse et les superstitions voyagent loin. En Malaisie, les gens croient que les hommes peuvent être protégés magiquement des balles et que seule une balle en argent ou en or pourra les tuer.
C’est historique, on disait que le vicomte Claverhouse (Bonny Dundee) était à l’épreuve des balles. De nombreuses personnes ont dit avoir vu des balles rebondir sur son manteau lors des combats. Quelqu’un a alors essayé de lui tirer dessus avec une balle en argent et les médecins ont dit : « L’opération a été un grand succès, le patient est mort ». Mon travail est d’observer, lorsque j’étais en Amérique j’ai essayé d’assister à des séances Vaudou, mais j’ai échoué. Si M. Hughs a raison les Docteurs d’Afrique Occidentale connaissent et utilisent le secret. J’espère pouvoir aller là-bas cet hiver et parvenir à le découvrir. Personnellement, je ne crois pas pour l’instant qu’ils m’accepteront parmi eux ou qu’ils me diront quelque chose mais on ne risque rien à essayer. J’ai au moins l’avantage de savoir ce que je cherche.
Si ce sujet vous intéresse je rajouterai que j’ai écrit un livre qui, je l’espère, sortira sous peu. On y trouvera bien plus que le peu que j’ai pu dire ce soir, jusqu’à présent je n’avais pas le droit de publier quoi que ce soit de véridique. C’était donc sous forme de fiction que j’en parlais dans mon livre précédent.




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Dans la joie nous nous sommes réunis, dans la joie nous nous séparons et dans la joie nous nous retrouverons!