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Avec l’Aide de la
Haute Magie
Chapitre XII – Spurnheath
par Gerald Gardner
version française
Tof
&
Xavier
Le soleil commençait à percer à travers une brume dense lorsque Thur, Morven,
Jan et Olaf sont sortis de la ville le lendemain matin. Après leur expérience
de la veille, les deux frères Bonder étaient quelque peu distraits et Morven
ne pouvait guère étouffer ses bâillements tant elle était fatiguée. Elle avait
mis tellement de force dans son étrange numéro musical qu’elle était
totalement épuisée. Après avoir libéré les prisonniers, ils étaient restés
assis à discuter jusqu’à tard dans la nuit, puis ils ont fait une razzia dans
le garde-manger et ont récupéré l’abondante nourriture qu’ils avaient rangée
dans les sacoches de leur selle. Thur chevauchait avec eux pour qu’ils passent
les portes de la ville sans encombre. Il semblait être le seul à ne pas être
épuisé. Devant eux il y avait les deux grands chariots qu’ils avaient amenés
la veille pour vendre du blé.
Thur a dit : « Eh bien, mes joyeux compagnons, si j’étais vous, j’irais
chercher un bosquet et je dormirai tout mon soûl, ça vous fera du bien et vous
pourrez facilement rattraper les chariots. Morven, sois prudente, je t’en
prie ! Je vous retrouverais à l’orme foudroyé près de la Stour, demain à
quatre heure, vous ne devez pas être là la nuit, je serais de retour à midi
après demain. Au revoir et que Dieu soit avec vous!
- J’aimerai que Thur ait vingt ans de moins, » a dit Olaf en soupirant alors
qu’ils le regardaient s’en aller au galop.
« Pourquoi ? » a demandé Jan en bâillant puis il s’est signé de peur que le
diable apparaisse dans sa gorge comme on le croyait à l’époque.
« Il serait avec nous pour plus longtemps. La mort va nous le voler et après
que ferons nous ?
- Les Dieux sont avec nous, pourquoi parler de la sorte ? Nous ferions mieux
de dormir, » à dit Morven en bâillant. « Pourquoi pensez-vous à ce genre de
chose ?
- Parce que, si on me laissait faire, je serais toujours avec lui.
- Hum, » grogna Jan. « As-tu envie de devenir médecin comme lui ?
- Non, je serais un grand mage, » a-t-il répondu modestement. « Je me
plongerai dans tous les mystères cachés et les papes et les rois attendraient
haletants mon assentiment.
- Il n’y a pas plus de bon sens dans ta tête que dans un pot fêlé ... Tu
ferais mieux d’attendre de devenir capitaine de tous mes hommes quand j’aurai
mon armée puis tu épouseras Morven. »
Cette idée ennuyait Olaf. « Un soldat, moi, jamais! Je n’aime pas les
effusions de sang inutiles mais je me battrai pour que tu retrouves tes
droits. Quant à épouser Morven, c’est ton rôle, tu es mon aîné de trois ans.
Non, c’est toi qui l’épouseras.
- Ce n’est pas avec vous que je trouverai facilement un mari, aucun de vous
deux ne veut de moi, » a dit sèchement Morven.
Pourtant, malgré ces paroles cassantes, elle ne pouvait pas s’empêcher de
fixer Jan d’un regard interrogateur.
Jan regarda son frère, puis Morven et fronça les sourcils. Son plan était
remis en cause. C’était une récompense appropriée pour les services de Morven
et Olaf serait honoré pour sa fidélité. « Non, le mariage n’est pas pour moi,
pas encore ... quand le temps sera venu je devrai chercher une alliance
puissante.
- Tu épouserais une héritière ? » a demandé Morven, la bouche sèche, pendant
qu’Olaf regardait son frère avec dégoût.
« Non, l’argent en lui-même n’a pas d’importance pour moi, seul compte ce
qu’on peut en faire. Avec de l’argent on pourrait engager des soldats.
- Donc, au lieu de chercher l’aide de la sorcière nous aurions mieux fait de
chercher le trésor d’un lutin au pied d’un arc en ciel ? » a dit Olaf
ironiquement.
Jan a ignoré cette pique et il a plutôt répondu à la question qu’il lisait
dans les yeux de Morven. Il y a vu une sorte de reproche dont il ne voyait pas
la cause, quelque chose dont il était innocent, à la fois en acte et en
intention. « Lorsque nous aurons chassé Fitz-Urse, par magie ou autrement,
nous serons encore faibles, » a-t-il expliqué de façon polie comme à son
habitude, une habitude qui le rendait aimable. « Ma seule façon de nous
renforcer est d’épouser la fille d’une famille riche et puissante. En
n’exigeant qu’une faible dot, ou pas de dot du tout, cela devrait être plus
facile. »
Jan hésitait. « Qu’est-ce que l’amour ? » a-t-il demandé alors que ses yeux
semblaient de plus en plus perdus dans le vide, comme s’il cherchait une
réponse à l’intérieur de lui-même. « Un désir insatisfait pour un beau visage
... une vision qui ne pourra jamais être mienne ? Ce n’est qu’un rêve dans
lequel tombe un homme sans en avoir conscience, comme dans une fosse creusée
par un ennemi. Un instant, il est heureux et son propre maître, le lendemain
il a vu ce qu’il ne peut avoir et tombe et jamais il ne sera plus l’homme
qu’il avait été. La noirceur de la fosse s’est refermé sur lui et sa seule
étoile c’est le souvenir de celle qui l’a plongé dans l’anéantissement. »
Le regard d’Olaf était plus dur que jamais. Est-ce qu’il était devenu fou ?
L’amour avait du le rendre fou comme ça arrivait a certains hommes, et tout le
monde sait que les fous parlent beaucoup !
Jan est sorti de sa transe et a secoué la tête comme s’il sortait de l’eau.
« Non, Morven, ne sois pas un cœur d’artichaut. Ma femme et moi nous pourrons
nous aimer quand nous en aurons l’occasion, mais nous devons d’abord arriver à
nos fins. »
Morven ne répondant pas, Olaf s’est précipité vers elle, réfléchissant de son
côté à Jan et ses affaires. Jusqu’à présent, Olaf n’avait envisagé cette
histoire de retrouver leur héritage plus comme une aventure dont ils seraient
les héros, que comme une question importante de la vie, telle que le labourage
de leur terre. Même l’expérience du triangle était totalement irréelle. Mais
ce que venait de dire Jan lui révélait à quel point la question était grave et
combien le ciel était sombre au dessus de leurs têtes, révélant des
difficultés insoupçonnées, l’assaut et la prise du château; l’assassinat de
Fitz-Urse, n’étant que le début de l’histoire et non sa fin, comme il l’avait
toujours imaginé.
Est-ce que son frère croyait vraiment en la magie et il s’y accrochait ou ne
s’en servait-il que comme un leurre ? Jan, qu’il pensait connaitre comme un
frère connaît son frère, s’était révélé en quelques mots être un étranger,
dont il n’avait aucune idée des pensées. Il a continué à le regarder avec
gravité, essayant de se rassurer et de se convaincre qu’il n’était pas
réellement un inconnu.
Quant à Jan, son esprit était obscurci par manque de sommeil. Il ne pouvait ni
réfléchir ni échafauder de plan, et il avait conscience de l’augmentation de
sa nervosité et de celle de ses compagnons. Il percevait aussi l’esprit
d’opposition qui agitait Olaf et Morven et, bien qu’il n’en voyait pas la
cause, il savait que cette hostilité pouvait contrecarrer ses projets. Y
avait-t-il là de quoi le troubler ? Les récriminations perpétuelles de sa
mère, sa résistance à tout ce qu’il proposait, traduisaient sa résolution de
ne pas accepter que ses fils soient maintenant des adultes. Il se disait : «
Nous ne sommes plus des enfants qu’on peut gronder et gifler pour qu’ils
obéissent, ne suis-je pas le propriétaire légitime de la ferme ? » Alors qu’il
marchait, maussade, derrière les chariots, il essayait de trouver une
explication raisonnable à son absence de la maison depuis vingt-quatre heures.
Il estimait qu’il était indigne pour lui de demander de l’aide à ses
compagnons pourvus d’un esprit plus vif. Il fit claquer sa langue contre ses
dents avec impatience et a fait signe à son cheval de se presser pour
rattraper les deux hommes. « Wat, » hurla-t-il entre ses mains en creux. « Wat,
Samkin. » Un vent qui se levait dispersait le brouillard et soufflait contre
lui, et les autres hommes ont continué leur chemin insouciants.
« Mais que fait Jan ? » a demandé Morven.
« Il envoie nos gens en avant, nous approchons du chemin forestier.
- Oh, » répondit-elle, et en fouillant dans sa poche, elle en a sorti deux
longueurs de ruban rouge vif.
« Qu’est-ce ... » a commencé Olaf avec curiosité pendant qu’elle nouait
rapidement les rubans sous chacun de ses genoux en faisait des nœuds bien
visibles à l’extérieur, elle a ensuite posé ses doigts contre ses lèvres en
signe d’avertissement.
Cela fait, elle a rapidement attrapés ses rênes et est allée en avant
rejoindre Jan qui avait galopé et rejoint ses hommes et discutait avec eux. « Wat, »
disait-il, « Hâtes-toi ! Demande à ma bonne mère d’être là à notre retour,
j’ai besoin de lui parler...
- Maitre Jan, vous allez pouvoir vous en charger, » lui a dit l’homme d’une
voix traînante en souriant. Elle voulait aller trouver Maitre Peterson car
elle a dit que quand vous êtes avec lui vous mettez un temps fou à revenir.
Nous devions donc vous ramener, sans ça ça risque de chauffer pour nous. »
En entendant cela Jan fut si choqué qu’il s’est plié et a giflé l’homme sur la
bouche. « Porc insolent, tu vas parler plus respectueusement à ceux qui te
sont supérieurs ! Va-t-en, ou je serais cause de ta mort ici et maintenant.
Suis-je un enfant pour être ramené à la maison comme une botte de foin par un
sot ?
- Non. Oui, Maitre Jan, je ne pensais pas vous manquer de respect. Je ne
faisais que répéter ce qu’a dit la Maîtresse.
- Très bien, dit maintenant à ta maîtresse ce que lui dit ton maître, va-t-en.
- Mais, cher Maitre Jan, la Maîtresse va me briser le crâne, c’est sûr. »
A ce moment Morven à fait cabrer son cheval, attirant ainsi l’attention sur
elle. Après quelques ruades elle a constaté avec satisfaction que Samkin
regardait les rubans rouges, il a saisi Wat par le bras : « Les jarretières
rouges » a-t-il dit en les désignant.
- Qu’est ce qui t’arrive bonhomme ? » a dit Wat encore irrité de s’être fait
réprimander.
- Regarde Bumble Wit, le Messager, les jarretières rouges sont de retour. »
Elle a mis un doigt sur ses lèvres en signe d’avertissement puis elle a fait
un signe secret avec le pouce et l’index. Elle s’est ensuite rapproché de Jan
et a attendu à son côté. Les deux hommes étaient très inquiets. Après avoir
chuchoté entre eux et regardé à nouveau Morven, ils ont fait un demi-tour
maladroit et se sont dirigés rapidement vers leur domicile et bientôt ils
n’étaient plus visibles.
Le soleil était chaud, et dans un champ à côté une meule de paille à moitié
démolie les invitait à se reposer. Jan l’a montré du doigt. « Le conseil de
Thur est bon, allons-nous dormir un peu ? Je n’arrive plus à réfléchir et j’ai
mal à la tête à cause du manque de sommeil. »
Ils ont attaché leurs chevaux et enlevé leur harnachement pour les laisser
paître. En se plaçant du côté opposé à la route ils ont chacun pu s’allonger
sur une couche confortable tout en restant invisible de la route. Jan s’est
endormi rapidement mais ni Morven ni Olaf n’ont eu cette chance. Bien qu’elle
avait très mal aux yeux, Morven ressassait ses pensées et fut incapable de
fermer l’œil. Elle aussi avait été confronté à la réalité, et de façon la plus
blessante pour son amour-propre. Jan avait révélé ce qu’il pensait ainsi que
toutes ses préoccupations quant à la dure réalité de son destin.
Non seulement il ne l’aimait pas d’amour, mais il n’avait pas d’autre projet
pour elle si ce n’est d’en faire, peut être, l’épouse de son frère. Elle
savourait l’amertume de ce qu’elle avait appris. La douleur était mentale,
mais cela lui faisait presque mal physiquement et la tourmentait beaucoup.
Thur était si sûr qu’elle n’avait qu’à attendre avec patience et que Jan se
tournerait vers elle, aussi sûr que le soleil se levait chaque jour, mais
maintenant elle savait que cela n’arriverait jamais. Est-ce que Jan n’avait
pas exprimé sa propre passion dans des termes qui faisaient de lui quelqu’un
de plus hautain qu’il ne l’était habituellement ?
Pourtant il y avait des moyens d’arriver à ses fins et elle les connaissait.
Comme maîtresse de l’art, elle pourrait contraindre sa conscience, la
réveiller et la diriger vers elle-même si elle en avait toujours envie. Elle
pourrait, si elle le voulait, en faire son esclave.
Elle était couchée, les yeux fermés, elle donnait ainsi l’impression de
dormir, luttant avec la tentation, mais tout en luttant avec une partie de sa
nature, elle savait que l’autre ne se satisferait jamais d’un amour provoqué
par les sorts et conservé par envoûtement, cela ne pourra pas la rendre
heureuse... Elle pourrait, si elle le voulait, avoir ont un esclave abruti,
mais ce dont elle avait vraiment besoin c’était d’un amour profond et
passionné, accordé volontairement parce qu’il était impératif et qu’on ne
pouvait l’ignorer. Elle ne voulait pas avoir honte de son amour en s’abaissant
à l’envoutement. Elle voulait un amant et un compagnon et non pas une victime
impuissante. Voilà sa décision, même si elle était difficile. Dans les
circonstances actuelles cette décision était presque héroïque. Heureusement
elle a réussi à dormir un peu, épuisée par l’excitation, la tristesse et les
larmes réprimées.
Olaf n’a pas dormi du tout. Il soupçonnait l’amour qu’éprouvait Morven pour
Jan et, jusqu’à il y a une heure, il pensait que lorsque son amour pour la
Dame de Londres aurait passé, Jan se tournerai inévitablement vers Morven,
mais ce rêve fut brisé brusquement. Jan, sans penser que cela provoquerait une
crise, avait annoncé son projet pour eux tous, il n’épousera pas Morven à
moins qu’elle n’ait une dot digne de la rançon d’un roi.
Comme il aimait aussi Morven, Olaf devinait bien ce qui était dans son esprit
et les souffrances qu’elle endurait. Peste soit des gens qui se préoccupent
tant de la vie des autres ! Tout d’abord sa mère et maintenant Jan, avec leur
éternel: « Fais ceci », « pense ça » et « croit ce qu’on te dit ». Olaf
impatient, donnait des coups de pied dans la paille. « Sois mon capitaine »,
« Epouse Morven ». Comme s’ils n’étaient que des sacs de blé posé ici puis là.
Et pourtant ... épouser Morven, voilà un destin qui serait pour lui une source
inespérée de bonheur.
Olaf aimait comme aiment les garçons imaginatifs : timidement, secrètement,
délicatement, tout en dégustant les douceurs sans penser, ou en tout cas pas
beaucoup, à leur accomplissement charnel, estimant qu’il serait suffisamment
temps pour parler mariage quand l’amour de Morven serait mort de privations et
de négligences et ce n’est qu’alors qu’elle pourrait se tourner vers lui.
Lorsque, par leurs efforts conjugués, ils auront fait de Jan quelqu’un
d’important, qu’allait-il advenir de Thur, de Morven et de lui-même ? Est-ce
que son destin sera de retourner à la ferme, soumis pour toujours à la
domination de sa mère et à son discours lancinant ? Non, il ne le voulait pas,
car même s’il avait parlé à la légère de l’idée de devenir un mage, il y avait
tout de même quelque chose de vrai dans sa déclaration. Il souhaitait
ardemment apprendre, avoir la capacité à penser clairement et de façon
concise. Pour y arriver deux voies se présentaient à lui, la voie difficile,
lente et sans risque en passant par l’Église et la voie dangereuse, difficile
mais rapide que pourrait lui enseigner Thur.
L’idée d’intégrer l’Église le révoltait. D’un premier abord, l’esprit d’Olaf
était plein de gaité, mais il était très sérieux et avait les yeux d’un
artiste, un amour de la beauté et le désir de créer. Selon sa mère, il était
né paresseux et préférait se cacher pour regarder les animaux de la forêt
plutôt que de passer la charrue dans les champs lorsque c’était son tour. Olaf
détestait de tels travaux non pas à cause de leur dureté ou de leur monotonie,
mais parce que pour bien l’accomplir la pensée de l’ouvrier doit être
concentrée sur sa tâche, sinon son travail en pâtira. Si un homme pouvait
labourer tout en réfléchissant aux relations entre Dieu et l’univers, il n’y
aurait pas eu de laboureur plus volontaire qu’Olaf, mais le travail de labour
consistait à tracer des sillons bien droits dans la terre et celui qui pense à
Dieu au lieu de penser à son travail tracera un sillon tordu. Ainsi, pour un
homme qui doit gagner son pain, mais qui souhaite avoir une vie
intellectuelle, la seule réponse était l’Église.
Olaf aimait se coucher sur le dos au bord d’un cours d’eau ensoleillé, à
regarder le ciel qui change, le soleil et le vent qui jouent dans les hautes
herbes qui ondulent, et il lui semblait que Dieu et son fils bienheureux
étaient responsables de toutes ces merveilles. Il était rempli de la joie de
Dieu, avec un sens respectueux de sa miséricorde et de son amour, tout en
sachant qu’il était lui-même imparfait et blâmable. Il était plein d’une
adoration humble et d’un désir intense de servir. Il savait que Dieu était
présent dans son cœur et son esprit. Il voulait le sentir à chaque heure de la
journée tout au long de sa vie ... juste l’amour et le miracle de Dieu qui se
reflète dans toutes ses œuvres et dans toutes ses créatures. Pourtant, quand
il entrait dans une église, toute cette extase avait disparu et il ne pouvait
plus la retrouver avant d’être à nouveau à l’extérieur.
Ce fait le troublait beaucoup. Il ne détestait pas l’autorité, au contraire:
il était capable de vénération extrême. Non, c’est l’interprétation que
faisait l’Église de Dieu et du Christ qu’Olaf trouvait inconciliable avec la
sienne, et il savait qu’il serait toujours hermétique à cette interprétation.
Tous les dogmes de l’Église semblaient restreindre Dieu aux dimensions d’une
pierre étroite. Dieu, qui a créé le monde et la vie, n’était associé qu’à la
mort et à la tombe, et l’humanité était contrainte de vivre dans l’attente de
la mort et de la tombe. La comparaison entre la simplicité et la pauvreté
affirmée par le Christ, son absence de biens matériels, et la cupidité de
l’Église toujours en quête de richesses, de pouvoir et de puissance, sont des
choses qu’il ne pouvait pas concilier. La liberté totale de choix que le
Christ a donné à l’humanité n’a pas trouvé d’écho dans l’enseignement de
l’Église. L’Église a fait Dieu à son image, mais Olaf était convaincu (il ne
savait pas d’où il le tenait) que Dieu était infiniment plus grand que les
pères de l’Église, si savant ou si saint qu’ils soient, puissent le concevoir.
Il songeait à tout cela en regardant le ciel et en cherchant l’inspiration,
car il était profondément troublé par sa propre attitude. L’Église montrait
une voie facile pour celui qui cherchait sincèrement la vérité et à apprendre.
Lui ne pouvait vénérer que celui qu’il pouvait respecter. Etant indiscipliné,
inflexible et n’aimant pas contrôler ses pensées, il était entré assez
rapidement en conflit avec l’Église qui ordonnait : « Pense ceci, pense cela.
Si tu oses penser autrement ce sera à tes risques et périls, ». Ces
instructions le révoltaient profondément. Ses commandements arrogants à
l’humanité sur ce qu’elle devait penser, ses restrictions intolérables au
sujet du plus grand de tous les dons de Dieu, la capacité de penser par
soi-même, et sa prétendue infaillibilité ne pouvaient être acceptés sans
sourciller par un savant honnête. Sa persécution de ceux qui osaient faire
preuve d’audace était une abomination qui remplissait Olaf d’animosité.
Persécuter un homme au nom de Dieu, parce que Dieu avait omis de lui conférer
le don de la foi (le plus sûre et le plus utile de tous les dons au
moyen-âge), est-ce que la bigoterie pouvait aller plus loin ?
A seize ans, un jeune en bonne santé n’avait pas vraiment l’étoffe d’un
martyr, il n’était pas fanatique, il aurait plutôt ricané et résisté
passivement. Si le bûcher était la récompense de la pensée sincère, il
garderait ses pensées pour lui-même, ne les confiant qu’à ceux en qui il
pouvait avoir confiance. L’Église n’aura pas son corps pour le brûler. Oui,
Thur était sa seule soupape de sécurité et il sera son mentor.
Au moment où Olaf pensait à tout cela, Jan s’agitait et s’étirait. « En
vérité, j’ai tellement faim que je mangerais un bœuf.
- Nous devons chevaucher un peu avant de manger, » a dit Olaf en regardant le
soleil. « Il doit être onze heure et si nous voulons atteindre Meldrums avant
la nuit nous n’avons pas de temps à perdre. Morven dort encore.
- Elle semble fâchée ce matin, » a ajouté Jan. « C’est une créature étrange...
que penses-tu d’elle ? Que pensera notre mère d’elle si elle entend parler de
ce voyage ? J’ai peur que ce voyage ne nous brouille encore plus avec notre
mère et qu’en plus cela ne fera pas avancer notre affaire.
- Mais Morven peut nous aider par son pouvoir.
- Quel pouvoir ? L’esprit qui nous a envoyé la chercher s’est moqué de nous.
- Mais elle a ce Thur cherchait, deux couteaux.
- Oui, mais selon moi elle est surtout un danger et un obstacle.
- Tu parles avec aigreur, tu es déçu car elle n’est pas horrible sorcière,
laide à faire peur au diable lui-même.
- Eh bien, tu pensais que les sorcières étaient comme elle ?
- Ce que je pensais n’a rien à voir avec la réalité. J’aurai pu imaginer
qu’elle était un esprit des eaux avec son visage très pâle et ses yeux verts.
J’ai vu des lys à la surface des étangs, avec le teint blanc et rose comme
Morven.
- Je n’ai que faire d’une fille blanche comme un lys, mais plutôt...
- Tu n’avais aucune idée de ce qu’était une sorcière avant que l’esprit nous
dise de la chercher » l’a coupé Olaf sèchement.
« Non, nous n’allons pas nous quereller à cause d’elle, ce serait lui donner
le pouvoir de faire du mal alors que personne ne le désire, » a répondu Jan en
mettant son bras sur l’épaule de son frère.
Désarmé, Olaf s’est mis à rire. « Il s’est passé des choses étranges hier,
espèce d’incrédule.
- Que s’est-il passé ? Je ne réalise pas vraiment. Thur a dit qu’elle a joué
de la harpe et que les soldats ont bu et se sont battus, c’est ce qu’ils font
toujours. Il n’y a pas besoin d’avoir une harpe pour les faire se battre quand
ils ont de la bière, mais je n’ai pas entendu une seule note de musique, et
toi ?
- Pas une note et Dieu sait que nous n’avions rien à faire à part rester
coucher et écouter. Je jure que nous ne dormions pas. J’avais trop de
crampes. »
Jan haussa les épaules, le mystère ne le fascinait pas vraiment, il était déçu
par Morven, il n’avait pas une grande foi en leur mission actuelle. Il était
naturellement buté et sceptique, et même si dans un moment de passion il avait
demandé l’aide de Thur pour invoquer des esprits pour qu’ils l’assistent, il
était comme un homme qui se noie et attrape une branche. Il respectait Thur
quand il était présent, mais son esprit revenait rapidement à des notions
préconçues sur le genre d’aide qu’il souhaitait, c'est-à-dire une bande de
partisans, des soldats professionnels bien armés, de l’or pour les payer, tous
produits comme par magie et sortis de nulle part par un coup de baguette.
L’avancement régulier, étape par étape, devant mener à un résultat prévu par
Thur et Morven et suivi patiemment, ne l’inspirait pas du tout, comme c’est le
cas avec tant de gens dans ce monde.
« Jan, » a dit Olaf lentement. Incapable d’exprimer ce qu’il pensait et
ressentait de la folie d’invoquer une aide surnaturelle, de ne pas y croire
quand elle arrivait et de ne pas suivre ses conseils parce qu’ils n’allaient
pas dans le sens des plans qu’il avait préparé.
« Quoi ? » grogna Jan de mauvaise grâce.
« Rien.
- Mais tu devais penser à quelque chose.
- Jan, tu n’as pas de patience, tu manques de jugement, tu n’as pas ce qu’il
faut pour rassembler des hommes et qu’ils te suivent aveuglément dans ton fol
espoir, » a dit Olaf vivement. « Pourquoi est-ce que Thur, Morven, et moi,
pour ne rien dire d’une centaine d’autres personnes, risquerions notre vie
pour un imbécile qui ne regarde pas plus loin que le bout de son nez ?
- Tu me traites d’imbécile ? » a dit Jan, piqué au vif.
- Oui, et chacun de tes actes et paroles le proclament.
- Comment ?
- Par tes manières affreuses, ton impolitesse, ton incrédulité et d’autres
folies indignes de toi. Si les esprits existent vraiment est-ce qu’ils ne sont
pas conscient que tu n’y crois pas ? Est-ce ainsi que tu espères te les
concilier ? Ne peux-tu pas te contenter d’être conduit pas à pas sur leur
chemin ? Ou est-ce que tu veux te replonger à corps perdu dans un abîme où ils
pourront te voir mais où tu ne les verras pas ?
- Ce que tu dis n’est pas sot, » a admis Jan après y avoir réfléchi un moment.
« Mais, comment un homme peut-il contrôler ses pensées ?
- Aie foi en Morven. Fais ce qu’elle demande, elle est aussi amicale que Thur
lui-même. Si elle agit pour toi sous la direction des esprits, laisse-la
faire.
- Ce que tu dis a du sens, mais je ne vois aucun signe montrant qu’elle agit
de la sorte.
- N’as-tu pas vu comme Wat et Samkin n’ont obéi à tes ordres qu’à partir du
moment où elle les a confirmé ?
- Je fais en sorte que mes hommes m’obéissent ou alors je sais pourquoi ils ne
le font pas, » a grommelé Jan.
« Non, frérot, ils obéissaient à notre mère, jusqu’à ce qu’elle leur a montré
quelque chose, ses jarretières rouges, je pense, puis ils ont obéi à Morven. »
Olaf a soufflé et continué. « C’est de la sorcellerie ou alors qu’est-ce ? Je
l’ai vu de mes propres yeux. Mon conseil est de l’amener à notre mère sans
tarder. Il ne faut pas lui refuser l’occasion d’être aimable et hospitalière,
et elle le sera, et peut-être que Morven pourra la charmer comme elle l’a fait
pour Wat et Samkin ?
- De quoi discutez-vous de façon si solennelle ? » a demandé Morven qui
s’était réveillée.
« Soit nous allons à Meldrums, soit on vous amène à Spurnheath voir notre
mère, c’est à vous de décider, » a dit Jan.
« Allons à Spurnheath, si votre mère est d’accord, mais je ne voudrais pas la
vexer par ma venue.
- Elle est d’humeur très changeante ... Personne ne sait jamais comment elle
va réagir.
« Vos deux hommes sont de la fraternité, ou ils savent des choses, si je
pouvais m’entretenir avec eux seul à seul, je pourrais en apprendre beaucoup,
» a-t-elle dit.
« C’est assez ! A cheval, » a dit Jan.
Ils ont chevauché en forêt jusqu’au lieu que leur avait désigné Thur comme
lieu de rencontre. Là Olaf a mis pied à terre et a gravé une grande croix sur
le tronc d’un hêtre. « Thur ne pourra pas rater ça, » a-t-il dit. Puis ils se
sont hâté jusqu’à atteindre l’orée du bois. Ils ont continué sur un chemin
bordé de pins. Le chemin était envahi par les herbes, c’était une simple piste
avec des ronces en fleurs fortement enchevêtrées qui s’accrochaient à ceux qui
passaient. C’était le lit d’un torrent à sec, depuis longtemps utilisé comme
sentier serpentant sur le flanc de la colline et se terminant sur un plateau
de pâturages marécageux même par temps sec. Il était très vert, avec une vue
sur toute la région en contre bas, les forêts et les champs, et au loin une
ligne qui brillait à l’horizon, c’était la mer. La colline de l’autre côté
avait une pente légère et, d’une source, un ruisseau descendait jusqu’au bas
de la colline. Près de ses rives herbeuses, il y avait des oies surveillées
par une jeune fille aux pieds nus, vêtue de quelques haillons. Une crinière de
cheveux blonds sauvages couvrait ses épaules et descendait jusqu’à sa taille.
Sa frange épaisse cachait son front; en dessous, ses yeux qui brillaient comme
ceux d’un lapin étaient tout aussi curieux, et regardaient vers eux. Jan et
Olaf l’ont salué joyeusement en passant. « Bonne journée, Truda.
- Bonjour, maîtres. » La jeune fille les regardait curieusement, puis elle a
fait un signe auquel Morven a répondu. Ils ont galopé sur l’herbe au pied de
la colline et le long du ruisseau. Une partie de la forêt gagnait sur les
terres labourées et celles où broutait le bétail. De la forêt venaient les
cris de porcs qui fouillaient entre les hêtres. Derrière il y a avait un corps
de ferme et ses dépendances vers où se dirigeait un chariot rempli de bois.
Voilà Spurnheath.
Au pied de la colline il y avait une route menant à la ferme. Morven regarda
autour d’elle, elle voyait partout des manifestations d’une bonne gestion,
d’ordre et de prospérité. Ils arrivèrent à la porte en même temps que le
chariot de bois. Ils se sont poussés pour le laisser passer. Morven n’a pas
demandé à Jan et Olaf pourquoi ils préféraient se trouver en queue de convoi
plutôt qu’à sa tête. La porte de la maison était ouverte et la femme qui en
est sortie s’est approchée de la grange et s’est placée contre le mur, en
équilibre sur ses talons, comme pour soulager la plante de ses pieds. Elle
avait placé ses mains contre ses grosses hanches. Ses bras étaient couverts de
farine et une odeur de pain en train de cuire trahissait ce qu’elle venait de
faire.
C’était une femme belle, grande et solide, mesurant un bon mètre quatre-vingt.
Sa peau très blanche accentuait ses beaux traits réguliers encadrés par des
cheveux bruns très sombres séparés en deux nattes épaisses. Elle était vêtue
d’une robe de laine d’un rouge lumineux qui lui allait bien. De grands yeux,
sombres et intelligents mais pleins de colère, regardaient le chariot
s’approcher. Le malheureux conducteur affichait une nonchalance qu’il était
loin de ressentir, il savait pourtant qu’elle n’avait pas vu ses enfants qui
se cachaient derrière les tas de bois.
« Chinnery, » a-t-elle éructé. « Dépêche-toi avec ce bois. Empile-le ! Hé
Tomkin! Viens et prête-lui main-forte. Empilez les petits troncs là-bas, ils
pourront sécher au soleil... mais... qu’est ce que c’est que ça ? »
Une enjambée soudaine l’a amené à la charrette où une fois que la partie
supérieure avait été déchargée on pouvait voir qu’une partie du chargement
n’était pas du bois coupé mais du bois ramassé dont une partie était pourrie.
Chinnery tremblait alors qu’Hildegarde attrapa un bâton et il s’efforça
d’esquiver les coups, mais elle tomba sur le malheureux et c’est de bon cœur
qu’elle lui envoya des coups sur le derrière. « Espèce de chien ! » a-t-elle
hurlé, son bras se levant et retombant comme un fléau. « Espèce de dégénéré,
fils du diable, espèce de fourbe trompeur! Je vais t’écorcher, » et elle a
poursuivi un Chinnery glapissant autour du chariot. Hildegarde s’est retrouvée
face à face à ses enfant et l’étrangère. Ahurie elle baissa son bâton de
surprise. « Bien, » a-t-elle crié avec indignation, « et qui es-tu,
maîtresse? »
« Je suis Morven, mon oncle Thur, le médecin, vous envoie ses salutations et
félicitations, Maîtresse Hugh. »
Hildegarde se calma et ouvrit la bouche, puis elle la referma brusquement. Ses
yeux en colère croisèrent ceux de ses deux fils. Il y avait quelque chose dans
leur regard qu’elle n’avait pas vu avant et qui l’a calmé.
Pendant ce temps Morven était descendue de cheval et en fouillant dans son sac
de selle elle en a sorti un pot en terre. « Alice Tchad vous envoie ceci. Elle
vous prie de goûter cela. C’est une de ses recettes, il y a de la noix pilée
et de miel, le tout est aromatisé avec des amandes. »
Hildegarde regardaient la silhouette mince, avec des vêtements comme
apprécient les jeunes, en drap brun. Elle n’a pas desserrée les dents,
s’abstenant de tout commentaire. Elle était fâchée et devait soit hurler soit
garder le silence.
« Vous regardez mon vêtement, » a poursuivi Morven. « Mon oncle trouve qu’il
est plus sûr que je voyage vêtue de la sorte, c’est moins dangereux pour Jan
et Olaf. Je viens chercher des parents de ma mère, il semble qu’ils vivent à
trois lieues d’ici et mon oncle me dit de vous demander un abri pour la nuit.
Hildegarde avala sa salive ce qui lui permis de retrouver son calme. « Tu
peux, bien sûr, sois la bienvenue, Morven. Mes fils sont de tristes vagabonds
qui me laissent jouer le rôle de l’homme de la maison et faire un travail
d’homme parce qu’ils sont partis s’amuser au loin avec le médecin. Mais je ne
savais pas que Thur avait une nièce.
- Il ne le savait pas lui-même avant de me voir, » lui a dit Morven, les yeux
écarquillés pleins de candeur. Elle a tendu le pot qu’Hildegarde a pris de
façon aussi gracieuse qu’elle a pu.
Chinnery est sorti de sous le chariot et a commencé à le décharger. Jan et
Olaf lui ont prêté la main alors que les deux femmes les ont regardés faire
avec un intérêt feint pour faire oublier le silence qui s’était installé entre
elles. Hildegarde n’était pas véritablement amicale et Morven le sentait bien,
elle attendait donc docilement le bon plaisir de son ainée.
Le bois était presque empilé lorsque Chinnery a pour la première fois
clairement vu Morven et ses yeux ont rencontré les rubans rouges. « Oh, les
jarretières rouges » s’est-il exclamé avec enthousiasme et il a laissé tomber
sa bûche comme s’il avait oublié ce qu’il était en train de faire, mais Morven
lui a envoyé un regard réprobateur. Chinnery a alors mis sa grosse main sur sa
bouche comme pour empêcher que d’autres paroles en sortent.
« Mais qu’est-ce qui se passe ? » s’est écriée Hildegarde exaspérée. « Tu n’as
pas eu assez de bâton pour pouvoir parler de jarretières rouge pendant que tu
ranges du bois pourri ? Allez, au travail si tu ne veux pas que je te brise le
crâne ! »
Wat et Samkin, qui avaient ramené avec eux les divers articles du marché, sont
arrivés, ce qui a fait diversion. Voyant leur maîtresse un bâton à la main et
un regard plus noir que d’habitude, ils se sont dits que le déchargement de
leurs marchandises allait être animé quand soudainement ils ont vu Jan, Olaf
et Morven.
L’esprit bucolique n’est pas gage de travaille rapide, surtout quand pendant
des heures, il a été question de sorcières et de sorcellerie. Leurs maîtres,
en compagnie de l’étrangère aux jarretières rouges, avaient dit qu’ils
seraient absents de la ferme. Ils devaient donc être réellement absents et
maintenant ils étaient face à leurs fantômes ! Ils ont aussitôt déchargé ce
qu’ils transportaient en marmonnant. Hildegarde n’a rien compris si ce n’est
les mots « jarretières rouges ».
Morven, lisant dans leurs esprits, a parlé calmement et clairement avant que
la tempête n’éclate. « Nous vous avons dépassé en passant par la forêt, »
a-t-elle expliqué. Sa sérénité les a rassurés et ils ont ramassé leurs
charges, prenant l’air stupide lorsqu’ils ont recroisé le regard en colère de
leur maîtresse.
« Des jarretières rouges, » a dit Hildegarde. « Es-tu venue ici pour
ensorceler tous mes gens avec tes parures ? On dirait des grands singes avec
leurs bavardages insensés sur ces jarretières rouges. »
Morven minaudait. « C’est la grande mode à Londres. Si elles vous plaisent, je
vous prie de les accepter.
- Moi ? Décorer mes jambes avec ça ? Qui les verrait ? Je ne suis pas une
prostituée pour montrer mes jambes à tout le monde. Si tu as des vêtements de
femme, mets-les. Allons dans la maison ! » Alors qu’Hildegarde se dirigeait
vers la maison, la gardeuse d’oies arrivait de la colline, son groupe d’oies
devant elle, elle regardait les femmes qui entraient dans la maison.
La maison est constituée d’une grande pièce avec un foyer au milieu et le trou
habituel pour laisser s’échapper la fumée. Les fenêtres très étroites ne
laissaient passer que peu de lumière, le sol de terre battue était couvert de
joncs et un escalier de bois, presque une échelle, menait à l’étage. Une jeune
servante s’affairait à une longue table étroite, elle mettait en place les
verres et les assiettes en bois. Une autre jeune fille s’activait à un énorme
chaudron accroché au dessus d’un feu. Non loin de là une porte conduisait à
une autre pièce où dormaient les femmes après qu’Hildegarde les y ai
enfermées. Hildegarde s’était autorisé le luxe d’avoir une chambre
individuelle, au grenier au dessus de la salle de séjour, alors que les hommes
de la ferme dormaient autour du feu dans le séjour.
« Tu vas dormir ici, avec les femmes, » a dit Hildegarde en désignant la
chambre. « Et enfile maintenant des vêtements de femme honnête avant que
d’autres hommes ne te voient, » a-t-elle dit en pensant qu’elle devrait
enfermer Morven cette nuit pour qu’elle soit en sécurité.
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