La Wica
Textes de/sur
Gerald Gardner
Textes de/sur les Prêtresses de Gardner
Les Anciennes Lois
Théologie, Dogmes et Croyances
Sur la Pratique
Sur l'Histoire
Lignée & Traditions
Le Livre des Ombres
Le Livre
des Plantes
Les Gens
L'Initiation
Le(s) Secret(s)
La Validité
Outils et Accessoires
Le NROOGD
Dion Fortune & The
Society of Inner Light
Alex Sanders & la
Tradition Alexandrienne
Chamanisme / Faery /
Huna
Magie Enochienne
Reclaiming / Feri /
3rd Road
Thelema
Tubal Cain
Autres
La Librairie
Le Cercle de la Pierre
Sorcières Liens
Dernières
mises à jour du site
|
Avec l’Aide de la
Haute Magie
Chapitre XVI - Dans le Grand
Cercle
par Gerald Gardner
version française
Tof
&
Xavier
Le message avait été envoyé à la ferme et les frères Bonder sont arrivés à
temps pour le souper. Tout le monde était tendu et excité, les astres étaient
favorables et cette nuit ils allaient participer à la grande expérience,
entrer dans le grand cercle.
Par une échelle, on accédait à un grenier entre le premier étage et le toit.
Thar avait décidé que ce serait là le meilleur endroit, ainsi lui et Morven
avaient passé de nombreuses heures à balayer les toiles d'araignées et les
années de poussière qui s’étaient accumulées, puis à récurer. Comme l’heure
approchait, Thur a dit aux deux frères: « Cette nuit, tout dépendra de vous
deux. Vous êtes venus ici en bravant la colère de votre mère quand elle le
découvrira, ne gâchez donc pas ce que je fais pour vous. »
Jan avait l’air perplexe. « Que voulez-vous dire ? » demanda-t-il timidement.
« Je pense à l’aventure du grand cercle, il ne faudra pas faire d’erreur car
je vais libérer de puissantes forces et c’est dangereux.
- Comment est-ce possible, Thur ? N’êtes-vous pas un mage ? Ne commandez-vous
pas aux esprits par votre savoir mystique ?
- Mon savoir mystique, comme vous l’appelez, ne fera que la moitié de la
chose. J’ai appris les rites et les incantations, mais je n’ai encore jamais
pratiqué l’art. Quand tout est dit et fait, c’est l’esprit seul qui accompli
réellement les merveilles et cette merveille en particulier. »
Jan regardait et se sentait éreinté, il murmura: « Je ne vous comprends
toujours pas.
- Lorsque je parle des pouvoirs de l’esprit, je pense à la maîtrise de soi...
le pouvoir d’être concentré fixement et sans relâche sur l’objet de ton
objectif, provoquer la chute de Fitz-Urse, la prise du château, et par cela
retrouver tes terres, tes titres et tes rentes. Tu ne dois penser qu’à cela et
à rien d’autre, Jan. »
Jan a ri, vraiment soulagé de constater qu’il ne lui en était demandé que si
peu après des avertissements aussi solennels. « Ce n’est pas très difficile, »
a-t-il répondu sans trop réfléchir. « Je ne pense qu’à ça, jour après jour. »
Thur trouva cet excès de confiance plus qu’inquiétant. « Jour après jour, ce
n’est pas suffisant, ces petites pensées n’ont pas grand-chose à voir avec une
concentration réelle de la pensée. Ces petites pensées sont communes à tous
les hommes, tu dois faire beaucoup plus que cela, ce qui te sera demandé c’est
d’y penser avec une intensité frénétique pendant au moins une heure et ne pas
laisser ta pensée divaguer ne serait-ce qu’un seul instant pendant tout le
temps où nous serons dans le cercle, ni laisser la moindre pensée parasite
pénétrer ton esprit. Ce n’est pas facile ... visualiser le château jusqu’à
croire que tu le voies réellement devant toi. »
Jan l’a regardé avec curiosité. « Je peux le faire, je le vois aussi
clairement que le clocher au milieu de village un jour de beau temps, je vois
la mer qui arrive à ses pieds et les mouettes qui crient autour de ses
remparts. Oh oui, je le vois bien.
- C’est bien mais il faudra le voir quand le moment sera venu et toi aussi
Olaf. Ce que j’ai dit à Jan est aussi vrai pour toi, mon garçon. Tout ceux qui
entrent dans le cercle avec moi pour m’aider, doivent m’aider en pensant comme
il se doit, ils doivent me donner de la force et donc augmenter mon pouvoir,
car si une seule personne dans le cercle laisse errer ses pensées et oublie ce
que nous sommes en train de faire, ne serait-ce qu’un instant, cela
m’affaiblira et nous empêchera donc d’atteindre notre but mais en plus, cela
nous mettra aussi tous en grand danger.
En danger ? » s’est exclamé Jan surpris.
« Oui, mon garçon, nos vies seraient en danger.
- Dans quelle mesure ?
- D’être foudroyé, » a dit Thur brutalement. « Rien n’est plus rapide qu’un
esprit pour détecter une faiblesse chez un mage ou un relâchement des pouvoirs
qui le commandent. Car je dois commander le pouvoir de guerre et de vengeance.
Il n’est pas intrinsèquement mauvais mais ce pouvoir est dangereux s’il n’est
pas contrôlé. L’esprit ne viendra jamais de son plein gré, je peux lui
ordonner de venir, et le faire en le séduisant et en l’aveuglant, en le
mystifiant et grâce à des encens odorant, car les tous esprits aiment les
encens liés à leur nature. Puis, lorsque j’aurai son écoute il faudra que je
lui commande par le pouvoir des noms sacrés et ainsi je le contraindrais à
obéir à ma volonté. Mais s’il sent la moindre faiblesse chez le mage, ou chez
n’importe quelle personne présente, il se rebellera tout de suit et désobéira,
et son pouvoir s’opposera à notre volonté. Cela pourrait finir par nous
détruire tous. Si vous faites le moindre écart lorsque vous construisez un
barrage pour alimenter un moulin, les eaux emprisonnées peuvent s’échapper et
détruire à la fois le barrage et vous-même. Pourtant l’eau ne vous veut pas de
mal, et elle travaillera volontier pour vous si vous la contrôlez. Alors,
n’oubliez pas que les esprits peuvent agir de même lorsque nous les laissons
faire. Notre faiblesse est leur force. Si nous perdons le contrôle, cela peut
aboutir à notre destruction.
- Mais pourquoi ne travaillent-ils pas pour nous de leur plein gré ? » a
demandé Morven.
« Chers enfants, nous pourrions aller à eux avec le chapeau à la main et leur
demander, ils pourraient peut-être œuvrer pour nous. Mais rappelle-toi, nous
devons d’abord entrer en contact avec eux et la seule façon que nous
connaissons pour le faire est de les piéger, aveugler leurs yeux et leur
esprit, et parler jusqu’à ce qu’ils ne puissent plus voir autre chose que nous
ni entendre d’autres sons que ceux sortant de notre bouche. Ne seriez-vous pas
en colère si, disons, un troupeau de moutons vous entourait et vous forçait à
travailler pour eux, en vous y contraignant, en vous bousculant et vous
mordant ? Je dois invoquer l’esprit par la force et utiliser de plus en plus
de force jusqu'à ce qu’il arrive, bon gré mal gré, et tout ce que je peux
offrir en retour ce sont des odeurs agréables, de la courtoisie et du respect.
Alors souvenez-vous, j’ai besoin de votre volonté à m’aider, toutes vos forces
et les images mentales que vous aurez fixées dans votre esprit, parce que
notre force combinée est leur faiblesse et c’est ainsi que nous pouvons les
forcer à obéir. »
Intimidés, tous ont répondu : « Nous allons le faire, Thur.
- Merci. Je n’en demande pas plus, Montons à l’étage et remercions Dieu d’être
avec nous. » Avec une certaine sobriété, à cause des grandes choses qui les
attendaient, ils ont gravi l’escalier jusqu’à la chambre où se trouvait la
baignoire, chaque homme portant un seau d’eau chaude qu’ils ont mélangés avec
l’eau froide qui était déjà dans la baignoire.
Thur s’est déshabillé et a exorcisé l’eau : « Je t’exorcise, Ô créature d’eau,
pour que tu chasses loin de toi toutes les impuretés et souillures des esprits
du monde des fantasmes, pour qu’ils ne puissent me nuire. Par la vertu de Dieu
tout-puissant, qui règne depuis les siècles des siècles. Par les noms de
Mertallia, Musalia, Dophalia, Nuemalia, Zitanseia, Goldaphaira, Dedulsaira,
Gheninairea, Geogropheira, Cedahi, Gilthar, Godieb, Ezoiil, Musil, Grassil,
Tamen, Puri, Godu, Hoznoth, Astroth, Tzabaoth, Adonai, Asia, On, El,
Tetragrammaton, Sherna, Ariston, Anaphaxeton, Segilaton, Primaneuraton.
Amen. »
Puis il s’est lavé soigneusement tout en disant : « Purge-moi, Ô Seigneur,
avec l’hysope et je serai pur. Lave-moi et je serai plus blanc que neige. »
Puis il a pris le sel et l’a béni en disant: « Que les bénédictions du Père
Tout-Puissant soient sur cette créature de sel. Que toutes malignités et
entraves en soient chassées et que toutes les bonnes choses puissent y
pénétrer, voilà pourquoi je te bénis pour que tu puisses m’aider. Amen. »
Il a versé ce sel exorcisé dans l’eau et s’est lavé à nouveau en disant : « Imanel,
Arnamon, Imato, Memeon, Vaphoron, Gardon, Existon, Zagverimn, Momerton,
Zarmesiton, Tilecon, Tixmion. Amen. »
Alors que l’invocation s’achevait il est sorti de l’eau, s’est séché et a
enfilé un vêtement de lin blanc immaculé.
Pendant tout ce temps, Jan s’est docilement concentré sur Fitz-Urse et son
château, mais l’attention d’Olaf était fixée sur Morven qui était entrée dans
le bain et pataugeait. Puis Thur a versé de l’eau sur elle en disant
solennellement : « Je te conjure, Ô créature qui est une jeune fille, par le
Dieu Très-Haut, le père de toutes les créatures, par le Père Elohim, le Père
Elohim Gebur et par le Père Elion, pour que tu n’aies ni la volonté ni le
pouvoir de me cacher quoi que ce soit et que tu me sois fidèle et obéissante.
Amen. »
Puis il lui a versé de l’eau dessus en disant : « Sois régénérée, nettoyée et
purifiée, pour que les esprits ne puissent ni te nuire, ni demeurer en toi.
Amen. »
Puis il a demandé aux frères Bonder de se déshabiller et d’aller tout les deux
dans la baignoire. Ils ont obéi en silence, en regardant discrètement Thur
tout en se frottant vigoureusement le corps. Thur sourit devant ce récurage,
jamais les deux frères ne s’étaient lavés aussi consciencieusement.
Prenant de l’eau dans la baignoire il l’a versé sur leur tête et l’a fait
couler en cascade sur tout leur corps en disant à chaque fois : « Sois pur et
régénéré, nettoyé et purifié au nom du Dieu ineffable, grand et éternel de
toutes vos iniquités, que la vertu du Très-Haut descende sur toi et demeure
éternellement sur toi pour toujours, ainsi tu auras le pouvoir et la force de
vaincre les désirs de ton cœur. Amen. »
Quand ils sont sortis de l’eau ils se sont séché, totalement soumis devant
l’étrangeté de cette insistance solennelle et inhabituelle sur la
purification. Thur leur a désigné deux vêtements de lin blanc immaculé et leur
a fait signe de les enfiler, puis il a dit : « Il est nécessaire que vous
portiez ces talismans sur la poitrine et il a accroché un pentacle de fer pour
Mars autour du cou de Jan et un mince disque d’or battu pour le Lion au cou
d’Olaf. Morven avait déjà le sien, le pentacle de Jupiter en argent. Chacun de
ces pentacles avait été gravé de signes kabbalistiques adaptée à son esprit
gouvernant. Sur sa poitrine Thur a ensuite suspendu trois des pentacles de fer
qu’il avait fait pour Bartzebal ainsi que son talisman personnel de Mercure
fait en laiton. Il a recouvert les pentacles de Bartzebal avec un mouchoir. Il
a ensuite encensé ses trois disciples et lui-même, puis il a à nouveau encensé
les talismans sur leur poitrine et sur la sienne en disant : « Voilà les
talismans et pentacles, parfumés avec les fumigations appropriées, avec eux
nous sommes assurés et encouragés à entrer là sans peur ou terreur et nous
n’aurons à craindre ni périls et ni dangers à condition que vous obéissiez à
mes ordres et fassiez tout ce que j’ordonnerai. Tout se passera selon mes
désirs. »
Après un moment de silence, il reprit la parole. « Jan et Olaf, vous aurez
besoin de vos épées, Morven a son athamé. Lorsque vous serez dans le cercle,
tenez votre arme dans votre main droite. » En parlant il a attrapé la lanterne
allumée et s’est tourné pour monter à l’échelle menant au grenier au-dessus.
Ils l’ont tous suivi. La lanterne éclairait faiblement la grande pièce. Thur
alluma une grande bougie sur l’autel placé au centre du grand cercle, en
disant : « Je t’exorcise, Ô créature de feu, au nom du Seigneur souverain et
éternel, par son nom ineffable qui est JHVH, par le nom Jah et par le nom de
pouvoir qu’est El, pour que tu éclaires le cœur de tous les esprits que nous
pouvons appeler dans ce cercle, afin qu’ils puissent apparaître devant nous
sans fraude ni tromperie, par lui, qui a créé toutes les choses. »
Puis en se déplaçant dans le sens du soleil, il a allumé d’autres bougies
autour du cercle. Quand il eut terminé l’éclairage était doux et régulier.
Pendant ce temps Morven l’avait suivi et avait allumé le charbon de bois dans
les braseros placés aux quatre points cardinaux et y a mis de l’encens. Alors
que les bougies étaient allumées on voyait mieux les détails de la pièce : de
grandes poutres de chêne partaient du sol et allaient jusqu’au sommet du toit,
dans l’ombres des brins de paille du toit de chaume, et ressemblaient à des
doigts crochus. Les signes kabbalistiques tracés à la craie sur des poutres,
lorsqu’on les découvrait, frappaient l’esprit avec toute la force d’un coup
physique en raison de leur mystère et de l’horreur qu’ils pouvaient impliquer.
On pouvait maintenant voir les marques du grand cercle et tous ses détails
compliqués. En tout il y avait quatre cercles. Celui à l’extérieur, un cercle
double, faisait 4 mètres 50, un second avait été tracé à 30 cm et un troisième
à nouveau à 30 cm. Ainsi, le cercle intérieur avait 3 métres 30 de diamètre. A
l’extérieur du grand cercle, mais ils le touchaient, il y avait des braseros
et aux points cardinaux quatre petits cercles doubles de 30 cm de diamètre. Un
triangle a été tracé au sud en dehors du cercle. Une porte a été marquée dans
le grand cercle en traçant deux lignes parallèles à 60 cm l’une de l’autre,
partant du cercle extérieur et allant jusqu’au cercle intérieur.
Les trois disciples attendaient son bon plaisir. Thur a donné à Morven un
encensoir et un panier de l'encens. Dans sa main droite, elle tenait son
athamé, elle tenait la poignée du panier accrochée à son avant bras. Jan a
reçu un puissant parchemin et une flasque de parfum, Olaf a reçu un stylo, du
parchemin et une petite corne d’encre, qu’il tenait en plus de son épée, en
prenant bien soin de ne rien laisser tomber.
Pendant ce temps Thur, debout au centre du cercle, tourné vers l’est, s’est
signé en disant : Atoh, Malkus, ve Geburah, ve Gedulah, le Olam. » Puis il est
allé du côté est du cercle et a dit : « Je vous convoque, vous éveille et vous
appelle vous puissances de l’est, pour garder ce cercle. Il a ensuite fait
cette même proclamation aux puissances du sud, de l’ouest et du nord, tour à
tour. Puis, avec la pointe de son épée consacrée, il a tracé chaque ligne du
grand cercle tout en soulevant soigneusement la pointe de son épée en forme
d’arc à chaque fois qu’il passait sur la porte, ainsi le cercle restait
inachevé à ces points.
Puis il a écrit les noms de pouvoirs entre les cercles. Au sud-est, il a écrit
JHVH (Jéhovah), au sud-ouest AHIA, au nord-ouest ALVIN et au nord-est ALH.
Dans le cercle intérieur, il a écrit, à l'est AL, au sud AGLA, à l'ouest JA et
au nord ADNI. Le tout en lettres hébraïques. Des pentacles ont été tracés
entre ces noms sur la circonférence du cercle.
Une fois tout cela fait, Thur est allé à chaque brasier, en commençant à l’est
et en se déplaçant dans le sens du soleil, il a éventé les charbons, suivi par
Morven qui a jeté dessus de l’encens d’aloès, de la muscade, de la gomme
allemande et du musc. Devant l’autel il y avait un grand brasier qui fut
maintenant allumé et on y a versé de l’encens.
Thur est sorti du cercle par la porte, suivi par Morven, il a ensuite
rassemblé ses disciples et les a conduits à l’intérieur du cercle. Il a fermé
la porte en terminant les lignes inachevées de la pointe de son épée tout en
disant : « Agla, Azoth, Adonaï », et il a tracé trois pentacles pour garder la
porte. Puis, en assignant à chacun des disciples une place, Thur a dit : « A
Chaque fois que je me déplacerai vous me suivrez d’un bon pas et malheur à
celui qui sortira du cercle, car je vais appeler des forces puissantes. »
Ce discours a eu raison des frères Bonder, l’espace était si limité qu’il
était difficile de se déplacer dans le cercle, leurs pieds semblaient
gigantesques, maladroits et presque collés aux plancher. Olaf a jeté un regard
de protestation muette au mage, mais il avait déjà commencé à entonner une
prière d’un ton riche et sonore.
Zanah Zamaii, Pindamon très puisant, Sidon très fort, El, Yod, He, Vau, He,
lah, Agla. Aidez-moi, moi un pécheur indigne qui a eu l’audace de prononcer
les noms sacrés, des noms que personne ne doit prononcer et invoquer sans se
mettre en très grand danger. Ainsi j’ai utilisé ces noms les plus saints, en
prenant des risques pour mon âme et mon corps. Pardon si j’ai péché de quelque
façon que ce soit car j’ai confiance en votre protection. Amen. »
En priant ainsi il a à nouveau encensé tout le monde puis s’est encensé
lui-même. Il était maintenant minuit. Dans tous les braseros les tisons
rougeoyaient et d’épais nuages de fumée parfumée montaient jusqu’à la chaume
et le long des poutres en dessinant des formes fantastiques, leur étrangeté
était encore accrue par l’éclairage venant de dessous émis par les brasiers,
ainsi le grenier semblait être peuplé d’êtres fantastiques venant d’un autre
monde. Thur se tenait devant l’autel, tourné vers l’est et a dit d’une voix
très forte : « Ô vous, esprits, je vous en conjure par le pouvoir, la sagesse,
et par la vertu de l’esprit de Dieu, par la grandeur de Dieu, par le nom sacré
de Dieu. EHEIEH.
Sur l’autel il y avait le dernier des quatre pentacles qu’il avait fait pour
Bartzebal. Il y avait aussi les cordes, le tissu noir et d’autres choses dont
il aurait besoin pour l’opération. Prenant ce pentacle, il l’a attaché avec
une corde et l’a enveloppé avec un tissu. Il a ensuite fait le tour du cercle
en marchant dans le sens du soleil, suivi des autres, à l'ouest il a baptisé
le pentacle avec de l'eau consacrée, en disant: « Ô créature de fer, je te
consacre à la place de ton maître, je te nomme Bartzebal. Tu es Bartzebal. »
En disant cela il l’a encensé dans la fumée parfumée du brasier, attisant la
flamme pour qu’elle s’élève, puis il a placé le pentacle par terre à l’ouest
puis, debout, la pointe de l’épée sur le pentacle, il a dit d’un ton incisif :
Moi, Thur Peterson, j’évoque ici le grand esprit Bartzebal pour qu’il vienne
m’aider, pour que Jan Bonder ici présent retrouve sa rang, ses terres et ses
honneurs. »
Prenant le pentacle il l’a placé sur l’autel et appela trois fois :
« Bartzebal viens, Bartzebal viens, Bartzebal VIENS. Viens pour aider Jan
Bonder, pour que ses désirs s’accomplissent. »
Thur a annoncé avec une conviction intense : « Bartzebal VA APPARAITRE. »
Les yeux de Jan guettaient frénétiquement l’approche de Bartzebal, s’attendant
à voir une apparition effrayante d’une immense force martiale, sans doute
annoncée par un coup de tonnerre assourdissant. A son grand soulagement rien
de tout cela n’est arrivé. Seule la voix familière et rassurante de Thur s’est
fait entendre à nouveau, il évoquait à nouveau l’esprit : « Viens, Ô Bartzebal,
par IOD le nom indivisible de Dieu, par le nom Tétragramme Elohim, par El,
fort et puissant, par le nom Elohim Gibor, merveilleux, je te conjure par le
nom, ELOTH VA DATH. »
Il y a eu ensuite une courte pause comme si l’univers tout entier attendait
ces grands noms et retenait son souffle. La respiration de Jan semblait s’être
éteinte dans sa poitrine et elle paraissait ne plus vouloir repartir. Il a
humidifié ses lèvres desséchées avec sa langue et regarda son frère.
Olaf, ses yeux clairs et brillants, avait le regard rivé sur le visage de Thur
en une adoration émerveillée, son vêtement blanc, avec ses beaux cheveux
rejetés vers l’arrière de sa tête ressemblaient aux pétales d’une hyacinthe et
ce culte de gloire l’illuminait, il émanait de lui une sorte de rayonnement
intérieur comme le feu dans le cœur d’un diamant, il ressemblait à un
archange, il ne manquait plus que la splendeur d’un un arc en ciel autour de
lui pour compléter l’illusion.
Olaf, perdu dans Dieu sait quel paradis que l’esprit humain était capable de
créer n’avait pas de place pour son frère dans ce paradis et Jan sentait toute
la désolation du fait qu’en ce moment il avait besoin de contact humain.
Il a regardé Morven contempler le mage avec une attention tranquille. Par
rapport à Olaf, son visage était sans expression, mais elle a croisé son
regard et l’a fixé, l’anxiété marquait son front clair. Elle fronça les
sourcils et secoua la tête pour l’avertir. Jan a compris ce qu’elle voulait
lui dire et il s’est arraché désespérément à ses pensées vagabondes. Il s’est
forcé à visualiser le château, il a même vu une tête casquée sur les remparts,
il décida que cette tête était celle de Fitz-Urse. Il a fixé son attention et,
voyant cela, Morven s’est apaisée.
Thur était maintenant à l’est de l'autel. Il a placé le pentacle, toujours lié
et voilé, sur un triangle marqué en son centre. Dans sa main droite il tenait
son épée magique levée vers le ciel avec le pommeau juste au-dessus du
pentacle, en disant: « Ô Bartzebal, je te conjure par le nom très saint,
SHADDAI, j’ai lié et voilé ce symbole de toi, qui est toi. Ainsi tu ne pourras
ni bouger, ni voir, ni entendre autre chose que ce que je voudrais. Je te
conjure donc d’apparaitre de façon visible.
Viens vite pour obéir à ma volonté, par le nom très saint nom El Ghai, je te
conjure par la vertu du très saint nom de Dieu, ADONAI MALLAKI. Par la vertu
de Methratton sa représentation. Par la vertu de ses anges qui ne cessent de
pleurer de jour ou de nuit, Qadosch, Qaosch, Oadosch, Elohim Adonai Tzabaothl
Et par les dix anges qui président les Sephiroth, par qui Dieu communique et
étend son influence sur les choses inférieures, il s’agit de Kether, Chokhmah,
Binah, Geburah, Tipereth, Netzah, Hod, Yesod et Malkuth. Je te conjure et
t’ordonne absolument, Ô Bartzebal, quelle que soit la partie de l’univers où
tu te trouves, par la vertu de ces noms sacrés : Adonaï, Yove, Ha, Kabir,
Messiachionah, Mal, Kah, Eral, Kuzy, Matzpatz, El Shaddaï, et par tous les
noms sacrés de Dieu qui ont été écrits dans le sang en signe d’alliance
éternelle.
Je te conjure par les noms de Dieu, très saints et inconnus, par la vertu
desquels il peut trembler chaque jour, Baruch, Barcurabon, Patachel, Alcheghek,
Aquachai, Honwrian Eheieh, Abbaton, Chevob, Cebon, Oyzroymas, Chaialbamachi,
Ortagu, Maleabelech, Helechyeze, Sechezze.
Ecoute, viens vite et sans délai devant nous. Je t’appelle, Bartzebal, esprit
de Mars. Bartzebal VIENS. Bartzebal VIENS. Bartzebal VIENS ! »
Thur prononça le dernier « viens » avec toute la force de sa volonté et de sa
voix la plus impérieuse. Puis, jetant plus d’encens au centre du brasier il a
fait signe à Morven de remettre de l’encens dans les autres, il a repris :
« Comme la voix de l’exorciste m’a dit : ‘Je m’enveloppe dans les ténèbres,
puis je me manifesterai à la lumière,’ viens Ô Bartzebal, viens ! Viens, Ô
Bartzebal, viens !
A nouveau l’ordre a été émis avec une force de volonté prodigieuse. Un nuage
de fumée dense s’élevait du grand brasier jusqu’à la chaume en se mêlant aux
fumées tout aussi denses émises pas les autres braseros. Thur a fait un signe
à Morven et elle est allée tranquillement d’un brasier à l’autre pour y
remettre des épices. Les nuages de fumée commençaient à redescendre du
plafond, tout le grenier étant plein de fumées tourbillonnantes, brumeuses et
étranges mais elles ne pénétraient cependant pas dans le cercle.
Jan regardait tout cela avec une sorte de dégoût intéressé. Ses sensations
étaient nombreuses, complexes et confuses. Il manquait de la patience infinie
nécessaire à celui qui étudie les mystères cachés, et après avoir eu le
souffle coupé en attendant quelque chose sans savoir exactement quoi, il
prenait plaisir au calme du moment. Il n’aimait vraiment pas tout ce qui se
passait, il détestait ça autant qu’il avait espéré cette aide. Il n’y avait
pas réfléchi et était étonné et troublé par sa réaction, par ce recul, qu’il
savait être instinctif. Comment pourrait-il comprendre que certaines natures
n’avaient aucune affinité avec l’occulte et si, momentanément, le voile se
levait, la vision qu’elles recevraient sera d’un ordre contraire à celle
expérimentée par le dévot.
Jan qui était tout d’abord réaliste croyait pourtant aux merveilles, mais
comme beaucoup il n’aimait pas y être trop confronté. Il croyait parce qu’il
n’y avait jamais réfléchi. ‘Va chez un magicien’, ‘Cherche une sorcière’,
étaient des pratiques courantes pour des personnes en difficultés... des
paroles faciles à prononcer et faciles à accepter mais elles impliquent aussi
‘Laisses-les faire le travail, tiens-t-en à l’écart’ et maintenant il se
trouvait au milieu de tout cela. Jan était si désespéré qu’il avait demandé
l’aide de la haute magie, et en y étant confronté, il s’y est impliqué avec
une grande réticence. Ce n’était pas ce à quoi il s’attendait, la sorcière
n’était pas mauvaise et laide, les rites du mage n’impliquaient pas tout une
ménagerie de serpents, de crapauds à verrues, de lézards et de chats noirs, et
comme bien d’autres, Jan était maintenant confronté à la différence entre le
rêve et la réalité de la magie. Il ne savait pas pourquoi, mais plus il voyait
de quoi il s’agissait et plus il voulait s’en éloigner. Lui tout ce qu’il
voulait, c’était une bonne armée de compagnons honnêtes, qui le suivrait au
combat pour qu’il puisse tuer son ennemi dans un combat d’homme à homme et
reprendre ce qui lui avait été dérobé, et c’est tout ce qu’il souhaitait sans
se demander une seule seconde pourquoi ces hommes devraient risquer leur vie
en luttant pour sa cause.
Il était vraiment intolérable que ce Bartzebal, quel qu’il fût, et qui avait
tant besoin d’être amadoué pour se présenter, soit à ce point indispensable.
Des femmes nues et de la fumée malodorante, alors que lui, Jan Bonder, au lieu
d’entrainer ses hommes à Deerleap, se trouvait là dans un cercle de 3 mètres
30 où il suivait Thur Peterson d’un pas lent et majestueux, jusqu’à en être
étourdi et engourdi par la tension et tout cela à cause de sa propre folie.
Voilà ce que pensait Jan.
Mais Thur observait la scène avec une approbation satisfaite. Les choses se
déroulaient comme le vieux docteur espagnol l’avait enseigné. Il a pris le
pentacle sur l’autel et s’est promené avec lui autour du cercle en le
présentant aux quatre directions. Une fois cela fait il est retourné au sud et
une fois encore il l’a baptisé avec l’eau et le feu, en répétant : « Ô
créature de fer et de Mars, doublement consacrée, tu peux approcher des portes
de l’ouest. » En disant cela il s’est approché de l’ouest et a ouvert le tissu
du pentacle, sans l’enlever, tout en exposant les trois autres pentacles sur
sa poitrine.
Remettant à nouveau le voile sur sa poitrine, il frappa le pentacle dans sa
main avec le plat de son épée, en disant : « Tu ne peux pas passer de la
dissimulation à la manifestation si ce n’est par la vertu du nom Alhim. Avant
toutes les choses il y avait le chaos et les ténèbres et les portes de la
nuit. Je suis le grand dans les pays des ombres. Je suis celui dont le nom est
ténèbres. Je suis l’exorciste au cœur de l’exorcisme. Apparais donc devant moi
car je suis celui qui ne connait pas la peur. Tu me connais. Alors, viens,
Bartzebal, VIENS ! Viens, Bartzebal, VIENS !
La fumée du brasier central s’est agitée violemment formant un pilier, qui
montait et descendait avec une énergie spasmodique. Des visages apparaissaient
et disparaissaient. Morven, sur un geste rapide de Thur, jeta une poignée
d’encens sur le brasier et, passant aux plus petits elle y a aussi remis de
l’encens. La fumée devint plus dense et plus parfumée. Une fois encore le mage
est allé à l’est de l’autel et s’est tourné vers l’ouest. Encore une fois il a
frappé le pentacle avec son épée et a parlé avec force : « Tu ne peux pas
passer de la dissimulation à la manifestation si ce n’est par la vertu de JHVH
... Après l’informe, le vide et l’obscurité, vient la lumière... Je suis la
lumière qui se lève dans les ténèbres. Je suis l’exorciste au cœur de
l’exorcisme. Apparais donc devant moi sous forme harmonieuse car je suis celui
qui a les forces de l’équilibre ... TU ME CONNAIS, ALORS APPARAIS. »
Thur a ensuite enlevé entièrement le voile du pentacle mais il l’a laissé
attaché, il a aussi soulevé les voiles des pentacles sur sa poitrine, puis les
a remis. Il a déclaré à voix haute : « Ô créature de fer et de Mars, trop
longtemps tu as habité les ténèbres. Quitte les ténèbres et cherche la
lumière. »
Il a remplacé le pentacle sur l’autel et, tenant l’épée dressée avec son
pommeau sur le pentacle il a dit : « Par tous les noms et pouvoirs déjà cités,
je te commande d’apparaitre de façon visible, au noms d’Herachio, Asacro,
Bedremuael, Math, Lerahlemi, Modoc, Archarzel, Zopiel, Blauteel, Baracata,
Edoniel, Elohim, Amagro, Abragateh, Samael, Gebrurahel, Cadato, Fra, Elohi,
Achsah, Emisha, Imachedel, Dama, Elamos, Izachel, Bael, Sergon, Demos. Ô
Seigneur Dieu, qui es assis dans les deux cieux, toi qui regardes l’abîme sous
toi, accorde-moi ta grâce, je t’en prie, afin que ce que je conçois dans mon
esprit, s’accomplisse par toi. Ô mon Dieu, souverain sur toutes choses. Amen.
Viens, je te conjure. Viens, Ô Bartzebal, viens!
L’agitation dans la colonne de fumée s’est accrue et devint de plus en plus
violente. Un visage d’une beauté sauvage et surnaturelle, bien plus grande que
la réalité, est apparu du côté ouest du cercle, son corps était instable, cela
allait et venait. Sur son visage il y avait une expression de mécontentement
morose mêlée d’étonnement qui était presque comique, un étonnement d’avoir été
pris au piège et forcé à apparaitre. Il s’agissait de Bartzebal.
Une explosion, un peu comme le son d’un gros gong frappé dans une grande pièce
éloignée, a retenti dans le grenier, et ils ont senti plutôt qu’entendu, une
question pleine de colère : « Que voulez-vous ? »
Est-ce que Bartzebal a vraiment parlé ou en réalité était-il silencieux ?
Etait-ce vraiment une voix ou plutôt une vibration creuse retentissant
simultanément dans chaque tête ? Jan n’en était pas sûr. Il a vu que
l’atmosphère du grenier s’éclaircissait, la fumée s’était concentrée et
formait une multitude de formes, se tordant en convulsions sans fin. Elles
semblaient avoir un souhait déterminé d’examiner l’intérieur du cercle et
poussaient et bousculaient de façon indiscipliné pour parvenir à leur fin,
comme si elles étaient curieuses de connaître les personnes qui étaient dans
le cercle. Jan n’était pas un pleutre, il n’avait pas peur mais son esprit
tremblait et il ressentait des pensées étranges et inhabituelles qui
agissaient sur son esprit comme si les êtres dans la fumée devant lui,
poussaient et réclamaient de l’attention. Une grande pensée s’était
matérialisée dans sa tête. Alors que Bartzebal s’était matérialisé par la
fumée de l’encens, une pensée liée à toutes les réactions émotionnelles liées
aux événements de l’heure qui venaient de s’écouler et la pensée persistait et
grandissait en force, Dieu était une réalité et il était avec lui, Jan Bonder.
Jusqu’alors Jan associait toujours Dieu à l’Eglise. En raison de ce que
l’Eglise était pour lui, il avait rejeté Dieu pensant qu’il n’était pas
meilleur que l’Eglise qui disait être l’église de Dieu. Jan avait entendu Thur
prier solennellement ce Dieu pour qu’il lui vienne en aide, et là, devant ses
yeux stupéfaits, Dieu s’était manifesté. Dans toute sa puissance et sa bonté,
il s’était manifesté à travers cet esprit de l’air, Bartzebal. Ses pensées sur
Morven et sa beauté, et tout son dégoût pour cette forme particulière de
manifestation avaient disparus. Tout avait disparu dans la révélation
incroyable que Dieu le voulait... et c’était juste ! L’Eglise dénonçait ce que
faisait Thur, déclarant que c’était un péché punissable de mort et interdit
par Dieu. Pourtant c’était Dieu qui aidait Thur. Jan savait que Thur
n’invoquait pas le diable et que l’Eglise disait que tous les sorciers
invoquaient le diable, pourtant il n’est pas possible d’invoquer le diable
avec le nom sacré de Dieu. Ce diable foudroierait sûrement sur place celui qui
s’y risquerait. Non, Thur avait invoqué Dieu avec une extrême révérence et
Dieu avait répondu à ses prières. Il est donc évident que c’était bien la
volonté de Dieu ! Dans cette création de Bartzebal, Jan a vu la main de Dieu
qui répondait à une solennelle prière et Bartzebal était là, envoyé par la
main de Dieu, même s’il n’en avait pas l’air heureux et qu’il était là contre
son gré. Il était lui-même là sans le vouloir vraiment, juste pour parvenir à
ses fins. N’était-ce pas péché ? Et Dieu dans son infinie bonté et sa
compassion avait entièrement accompli cette chose, réalisé cette merveille
pour qu’il puisse comprendre.
Pendant ce temps Thur, voyant la forme de Bartzebal se matérialiser, écarta le
voile qui couvrait les pentacles sur sa poitrine. Bartzebal les regarda et
détourna les yeux avec inquiétude, mais irrépressiblement il fut poussé à les
regarder à nouveau car les pentacles, par les rites de leur fabrication et de
leur consécration, était devenue une partie intégrante de sa nature. Tant
qu’ils étaient restés voilés, il était aveugle et sourd. Quel que soit le lieu
où il était, Batzebal n’était conscient que des paroles du mage, il était
attiré vers le cercle par les incantations et l’encens, et alors qu’ils
augmentaient, il fut contraint à se matérialiser. Une fois là, les pentacles
furent dévoilés devant lui, il pouvait voir et entendre le mage de façon
claire et les incantations répétées le contraignaient à lui obéir, même si il
était furieux d’être ainsi pris au piège. Furieux ou pas, il ne pouvait pas
s’échapper tant que son heure ne s’était pas écoulée. Mais étant contrarié, il
ferait de son mieux pour éviter d’agir, tergiverser, gagner du temps et
essayer de temporiser avec la volonté du mage. Mais Thur était déjà préparé à
ça.
Thur a jeté encore plus d’encens dans le brasero et Morven en a remis dans les
quatre braseros extérieur. Bartzebal tenté de contrer ces tactiques se boucha
les narines pour ne pas sentir les parfums mais en vain, ces odeurs étaient
trop séduisantes et il a abdiqué en faisant confiance aux événements pour s’en
sortir. Il a donc inspiré de touts ses poumons le mélange d’odeurs qu’il
aimait tant.
Comme la fumée dense s’élevait, Jan a vu qu’elle était attirée, comme par un
vent puissant, vers les êtres à l’extérieur du cercle. Ils éveillaient la
curiosité de Jan, il les a vus devenir de plus en plus distinct, semblant se
construire à partir des fumées odorantes. Dans leur empressement à assembler
leurs corps, ils se pressaient pour absorber la fumée, sans jamais traverser
le cercle extérieur. Ce cercle était comme un rempart protecteur pour ceux qui
étaient à l'intérieur, il semblait chargé d’une force prodigieuse qui
repoussait toute invasion. Il a vu ces formes se bousculer violement les unes
les autres, de sorte qu’elles touchaient presque le cercle mais étaient
violemment repoussées en arrière. Plusieurs formes qui avaient effectivement
touché le cercle avaient été désintégrées en volutes de fumée immédiatement
absorbées par leurs voisines. Encore une fois à l’intérieur du cercle
l’atmosphère s’est éclairci, seules des colonnes de fumée d’encens s’élevaient
constamment des brasiers dans la pièce jusqu’à mi-hauteur puis retombaient
vers l’extérieur et les nombreux êtres qui regardaient en silence dans toutes
sortes de positions. Jan avait la sensation que des yeux âgés d’un million
d'années le regardait, voyait jusqu’à son âme et demandaient en silence :
« Que cherches-tu ?»
A nouveau une voix semblable à un grand coup de gong retenti dans le grenier :
« Que cherches-tu ? Je voudrais m’en aller. » Bartzebal a imprimé cela en
toute simplicité dans leur esprit.
Thur a enlevé les cordons du pentacle posé sur l’autel. Il parlait avec une
autorité courtoise : « Salut, Ô Bartzebal. J’invoque sur toi le pouvoir de
l’apparence visible et du discours, par le pouvoir de Dieu tout puissant,
seigneur des siècles des siècles. Je te conjure, Ô Bartzebal, dis-moi en
vérité comment Jan Bander ici présent peut réaliser ses désirs ? »
Bartzebal, articula une réponse en termes non équivoques: « Tu n’as pas le
pouvoir de me contraindre à répondre. »
Thur a présenté tour à tour les pentacles accrochés à son cou. Bartzebal a
regardé, ses yeux sortaient de sa tête. Avec un effort, il a détourné les
yeux, mais quelque chose l’attirait et, comme fasciné, il a regardé à nouveau.
Bartzebal se raidit et se plaça devant Thur comme s’il le défiait.
Thur a donné un ordre impératif : « Entre dans le triangle. » Il a fait un
signe menaçant avec son épée, il présenté les pentacles accroché à son cou en
disant: « Voici les choses secrètes, les pentacles de Mars, ton seigneur. Ce
sont les standards de Dieu, le conquérant, les armes du tout puissant, pour
contraindre les puissances de l’air. »
Bartzebal revêche est entré dans le triangle comme s’il ne savait pas ce qu’il
faisait.
Thur continua : « Je te commande absolument par ces pouvoirs, par la vertu de
Dieu le tout puissant. Ainsi, réponds à mes questions et dis-moi en vérité
comment Jan Bander peut réaliser ses désirs ? »
Bartzebal roulait des yeux, mais restait maussade et muet.
Thur dit : « Je t’exorcise à nouveau et te commande avec force, je te commande
de toutes ma force et avec violence, par celui qui ‘dit et la chose arrive’.
Par les noms de pouvoir, El Shaddaï, Elohim, Elohi, Tzabaoth, Asser, Eheieh,
Yah, Tetragrammaton, qui désignent Dieu, le grand et le tout puissant et par
ses noms sacrés nous accomplirons notre tâche.
- Pourquoi devrais-je vous aider, vous qui n’êtes rien pour moi ? » a demandé
Bartzebal, trahissant une grande affinité avec l’humanité. « Une fois encore,
nous te commandons avec véhémence et nous t’exorcisons avec constance, par la
vertu de ces noms: Ahai, Aetchedad, Iransin, Emeth, Chaia, Iona, Profa, Titach,
Benani, Briah, Theit, et tous ceux dont les noms sont écrits dans les cieux en
caractères malachites. Par le Dieu vivant qui demeure dans la lumière, dont le
nom est sagesse et dont l’esprit est vie, devant qui s’inclinent le feu et la
flamme, qui, avec le feu fixé au firmament, les étoiles et le soleil, avec le
feu te bruleront éternellement ainsi que tous ceux qui contreviennent à
l’expression de sa volonté. Alors exécute rapidement notre ordre. »
Une expression de malice sournoise mêlée de révolte apparut sur le visage de
l’esprit. « Comment moi Bartzebal, pourrais-je répondre à tes questions, alors
que ton propre homme ne sait pas réellement quels sont ses désirs ? »
Jan a parlé avec une franchise presque méprisant: « Je sais ce que je veux,
vil rebelle. C’est d’obtenir ....» Il a fait une pause, stoppé par un geste de
Morven et il regarda l’avertissement intense dans ses yeux. Il réfléchi en
vitesse, « Ainsi Bartzebal sait ce qui se passe dans nos esprits. »
Thur s’est tourné en tout hâte vers lui. « Dis lui, espèce de nigaud, ce que
tu désires. »
Mais Jan était comme dans un rêve. Olaf lui a donné un coup pour attirer son
attention, Morven désespérée ferma les yeux et Bartzebal sourit furieusement.
« Je désire deux choses, » a dit Jan avec une grande netteté. « Tout d’abord
accomplir la volonté de Dieu et deuxièmement reprendre les terres et la
fortune de mon grand-père qui en a été dépossédé par Usa Fitz-Urse ainsi que
rétablir ma famille. » Mais tout en disant ça une pensée a surgit dans son
esprit : « Je veux Morven. »
Bartezebal hocha la tête : « Je suis Bartzebal, l’esprit de Mars. Je peux
aider en matière de guerre et de vengeance, et oui aussi pour la trahison. Je
m’occupe aussi de pouvoir et de succès. Mais tes désirs doivent être uniques,
distincts. Ta volonté doit être claire et stable comme une flamme. Ce n’est
pas ton cas. Je ne peux donc pas accorder ton vœu, car je ne peux pas accorder
l’amour d’une femme.
- Tu n’as pas le pouvoir de contrecarrer la volonté de Dieu, » a dit Jan
obstinément « et si c’est sa volonté, je connaitrai le succès, parce que ma
propre volonté brûle comme une flamme. » Il cherchait à nouveau à visualiser
le château.
Mais alors qu’il était encore en train de parler, la forme de Bartzebal
commença à se désintégrer en vapeur tout comme les êtres à l’extérieur du
cercle, seuls leurs yeux étranges brillaient dans une attente vigilante, comme
s’ils attendaient cet événement funeste.
« Il essaie de se soustraire à moi et l’heure de Mars s’écoule rapidement,
elle sera bientôt passée et il ne sera plus en mon pouvoir, » a murmuré Thur à
Morven. « S’il s’en va sans m’obéir plus jamais je n’évoquerai un esprit.
- Allez, hâtez-vous, » exhorta Morven en lui tendant un morceau de parchemin.
Thur a pris une plume que lui tendait Olaf et a tracé rapidement dessus le
sceau de Bartzebal.
Pendant ce temps Morven versait de la gomme-résine nauséabonde, de la rue et
la férule persique sur le brasier alors que Thur tenait le parchemin dans la
fumée dense qui s’élevait en disant : « Je te conjure, Ô créature de feu, par
celui qui déplaça la terre et la fit trembler, brûle et tourmente cet esprit
pour qu’il le sente intensément, de sorte que par toi il brûle
éternellement. » Il a mis le parchemin dans le brasier en le pressant contre
les braises ardentes en disant : « Sois damné éternellement, réprouvé
éternellement, sois tourmenté par la douleur perpétuelle et que jamais tu ne
trouves le repos, jour ou nuit, si tu n’obéis pas immédiatement. Son ordre a
fait trembler l’univers, par ces noms et par la vertu de ces noms qui sont
invoqués, toutes les créatures obéissent et tremblent de peur et de terreur.
Ces noms qui peuvent détourner la foudre et le tonnerre te feront périr
instantanément, ils te détruiront et te chasseront. Ces noms sont : Aleph,
Beth, Gimal, Delath, He, Mau, Zayan, Cheteth, Teh, Yod, Kapath, Lam, Med, Mem,
Nuns, Mekh, Ayan, Pe, Tzaddi, Quopth, Resh, Shin, Tau. » (Note de l’auteur :
Ce sont les lettres de l’alphabet hébreu, mais ils ont été utilisés en magie
dans ce but.)
Thur a continué : « Donc par ces noms secrets et par les signes, qui sont
remplis de mystères, et en vertu du pouvoir des trois principautés, que sont
Aleph, Mein, et Shin, par l’air, le feu et l’eau, nous te maudissons. »
Thur a pris une pause impressionnante. Bartzebal chancelait, comme si un coup
de vent avait envahi le grenier. Son visage était déformé par la rage et la
douleur, le feu sortait de ses yeux, sa forme devenait plus dense et plus
grande, il les dominait, menaçant. Sa voix martelait leurs oreilles
douloureuses, ils craignaient que leurs tympans n’éclatent... « Cherchez Evan
Œufs de Mouette. Lui seul peut vous vous guider sur le chemin secret. Tuez.
Tuez. Tuez en mon nom. Laissez-moi partir. LAISSEZ-MOI PARTIR. »
Thur arracha le parchemin racorni du brasier. La forme de Bartzebal s’est
désagrégée en un nuage de fumée épaisse et huileuse. En dehors du cercle, les
yeux curieux avaient disparu et la fumée qui formait leurs corps fut aspirée
dans le cercle, étouffant à moitié nos protagonistes.
« Ne quittez pas le cercle ce serait dangereux, » a ordonné Thur. « Je vais
les renvoyer. » Il a mis de encens dans le brasier et, en présentant le
pentacle qui se trouvait sur l’autel il a tracé un pentacle dans les airs avec
la pointe de son épée, en commençant par le côté inférieur gauche et en allant
vers le haut, il chanta : « Par la vertu de ces pentacles et parce que vous
avez obéi aux commandements du créateur, sentez et respirez ces odeurs de
remerciement puis allez-vous en vers vos demeures et logis. Que la paix règne
entre nous et vous. Soyez prêt à venir lorsque je vous convoquerais. Que la
bénédiction de Dieu soit sur vous, pour autant que soyez capable de la
recevoir...
Camiack, Eome, Emoii, Zazean, Maipiat, Lacrath, Tendac, and Vulamai.
Par ces noms sacrés et par les autres qui sont écrits dans le livre d’Assamaian
Sepher Ha, Shamaiimin. Retournez en paix. Amen. Allez. Allez. ALLEZ.
Le cercle fut soudain envahi de fumée noire et suffocante. Thur a brandi son
épée devant lui dans un geste final de dispersion et il est sorti du cercle,
suivi par les autres. Ils se sont précipités au bas de l’échelle, à moitié
étouffé, en inspirant à grandes bouffées une fois dans la pièce du bas remplie
d’air pur.
retour
|