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"Nous les Sorcières, sommes des Personnes toutes Simples"
par Eleanor Bone in Life 1964
Mme
Ray Bone, une femme au foyer et manager d’un foyer pour personnes âgées
est aussi une grande prêtresse. Elle donne ici le point de vue d’une
sorcière sur sa pratique.
Pour
trouver l’origine de la sorcellerie, il faut remonter loin dans le
temps, des milliers d’années avant le christianisme, jusqu’à l’ancienne
religion, une religion païenne. Vous vous demandez si nous sommes
païens et la réponse est : « Oui, nous sommes païens » Je ne doute pas
que les gens vont dire « Païen ! Cela signifie sûrement idolâtres ».
C’est le sens que donne le dictionnaire à ce mot, mais le mot vient du
latin pagus – une circonscription à la campagne. Païen signifie donc
simplement « de la campagne. »
En anglais le mot « sorcière » est dérivé du mot anglo-saxon « wicca »
qui signifie « le sage » ou « le sorcier ». Les wiccan étaient les
prêtres de l’ancienne religion qui adoraient le dieu soleil et la
déesse lune. Lié de façon indissociable à la déesse lune il y avait le
chat, symbole de l’aspect féminin du divin.
Partout où existait le culte des sorcières, ses adeptes se réunissaient
quatre fois par an pour célébrer les mystères de leur foi. C’étaient
les quatre grands Sabbats - la Chandeleur, la Veille de Mai, Lammas et
Halloween (ou Samhain comme on l’appelait alors, ce qui signifie « fin
de l’été »). Cette division de l’année met l’accent sur les saisons de
reproduction de certains animaux sauvages et domestiques.
Autrefois, le « coven » des sorcières se réunissait aussi chaque
semaine pour des Esbats. Ces réunions étaient en partie liées aux
affaires courantes du coven et en partie religieuse. Les sorcières
étaient ceux qui conseillaient les gens ordinaires. C’étaient des
guérisseurs, habiles dans l’utilisation des plantes et la distillation
des potions. Aux grands sabbats, quand tout le monde se rassemblait,
une fête était organisée pour célébrer les dons des dieux.
Il y avait une croyance populaire voulant que les sorcières se
rendaient à ces rencontres en volant sur balais, mais je pense qu’elles
ne volaient que dans leur imagination. On retrouve de nombreuses
recettes pour des « onguents de vol » ayant traversé les siècles, et
bien évidemment certaines des plantes entrant dans leur composition,
comme l’aconit et la belladone, quand on les frotte sur la peau,
peuvent induire des états de transe, des hallucinations et une
sensation de voler. Des balais étaient certainement utilisés dans
certains rites de fertilité. Les sorcières dansaient en cercle à cheval
sur leurs balais, sautant en l’air de temps à autre, en pensant que
plus elles sautaient haut, plus cela favorisera la croissance des
cultures dans les champs.
Il faut se souvenir que le christianisme a été introduit en Angleterre
par des étrangers : Augustin, premier archevêque de Canterbury est venu
de Rome et au septième siècle, l’église a été organisée en Angleterre
par Théodore de Tarse avec l’aide d’Hadrien l’Africain. Guillaume le
Conquérant était chrétien mais ses Normands étaient principalement des
adeptes de l’ancienne religion. Même les prêtres de cette époque
servaient souvent à la fois les dieux païens et le Dieu chrétien. En
1282 le prêtre d’Inverkeithing a conduit la danse de fertilité autour
du cimetière.
Au 13ème siècle la « sorcellerie » a été déclarée hérétique, mais ce
n’est qu’au 14ème siècle que les relations entre les deux religions se
sont vraiment envenimées. La bataille a fait rage aux 16ème et 17ème
siècles, les païens se sont défendus, mais ont perdu. Les dernières
lois contre la sorcellerie n’ont été abrogées qu’en 1951.
Parlons maintenant des sorcières du 20ème siècle. Quel genre de personnes sont-elles ?
Eh bien, nous sommes juste des personnes ordinaires, occupant divers
emplois. Nous sommes raisonnablement intelligents. Nous avons des
médecins, des enseignants, des hommes d’affaires, des agriculteurs, des
infirmières, des gens de théâtre, des employés de bureau et des femmes
au foyer parmi nous. La plupart d’entre nous ont étudié la religion
comparée. Nous n’essayons pas de convertir les autres, mais nous
encourageons les personnes qui ont une attirance pour la sorcellerie.
Nous n’acceptons pas tous ceux qui veulent se joindre à nous.
Il est difficile d’estimer le nombre de sorcières car tous les coven ne
se connaissent pas les uns des autres, mais l’intérêt semble grandir.
Je pense qu’une des explications est que les gens ne parviennent plus à
trouver la satisfaction spirituelle qu’ils recherchent dans les
religions organisées.
Pourquoi sommes-nous sorcières? La raison, je suppose, est que nous
savons que c’est la voie qui est la bonne pour nous. La sorcellerie est
un culte de la fertilité : nous adorons la source de vie. Notre dieu,
toujours l’ancien dieu cornu, représente pour nous à la fois la vie et
la mort. Nous ne le craignons pas parce que nous croyons en la
réincarnation.
Nous nous réunissons normalement une fois par mois lunaire et nous célébrons toujours les quatre grands Sabbats.
La Chandeleur était à l’origine la fête des lumières, qui était
célébrée le 1er février avec un feu cérémoniel et était liée au retour
de la déesse du monde de sous terre et à la renaissance de la nature au
printemps.
La Veille de Mai, ou Beltane, était un festival du feu et était célébré
pour stimuler le soleil comme agent générant la vie au début de l’été.
A Halloween les bergers répétaient les rites de Beltane pour célébrer l’arrivée de l’hiver.
Yule est devenu synonyme du solstice d’hiver, le tournant de l’année,
la renaissance du soleil et le renouvellement de la fertilité.
Je pense que l’on sait que nous sommes nus lors de nos rites. On nous a
désapprouvés pour cela, même si selon moi il est évident qu’une
personne peut être tout aussi immorale avec ou sans vêtements. Les
sorcières (femmes) portent toujours un collier, un symbole de la
renaissance et la grande prêtresse porte un large bracelet d’argent
avec son nom de sorcière gravé dessus.
Dans notre cercle, l’autel est placé d’est en ouest. Nous pratiquons
nos rites, nous dansons, nous chantons. Ensuite nous nous asseyons et
discutons.
Nous essayons d’aider ceux-ci qui ont des contrariétés ou des problèmes
qu’ils n’arrivent pas résoudre seuls. De nombreuses personnes nous
écrivent pour demander notre aide. Nous répondons à toutes les lettres
qui demandent notre aide. Souvent on nous demande juste des conseils en
matière de mariage. En cette époque de science, de médecins, de
psychiatres, de vétérinaires, d’aide juridique, de médicaments
chimiques et d’ordinateurs - on pourrait se dire qu’il n’y a plus de
place pour la sorcière. Mais le soleil continue à se lever le matin et
se coucher le soir: la nuit la lune veille sur nous. Les saisons
succèdent aux saisons et il y a une nouvelle vie dans les champs, chez
les animaux et les hommes. Et si le soleil ne se levait plus et ne se
couchait plus, s’il n’y plus de soleil, à quoi nous servirait la
science ? La source de vie ne serait plus là.
Nous les sorcières du 20ème siècle sommes heureuses de notre savoir,
nous ne sommes que des personnes toutes simples avec des croyances
toutes simples. Nous savons que quoi qu’il arrive, « un autre soleil se
lèvera demain. »
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