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LES MIROIRS MAGIQUES
XXIII LES TABLEAUX VIVANTS
Dans certaines conditions, et en accomplissant scrupuleusement le travail
magique, dont les principes seront donnés dans ce chapitre, on peut animer,
c'est-à-dire rendre réellement vivants, des portraits et des statues, en vue
d’influencer un ou plusieurs sens d'un homme ou d'une femme choisis.
L’'influence, qu'on projette ainsi, peut être mentale ou physique,
indifféremment.
La doctrine des tableaux magiquement animés n'est pas nouvelle. Au Moyen Age,
certains peintres la connaissaient très bien et l'appliquaient avec art; mais on
cite aussi des cas où le fluide magnétique humain s'était concentré de lui-même
sur un deux portrait, oublié dans le coin d'un salon de quelque château féodal,
où se déroulèrent, à travers les années monotones, des scènes de passion
violentes.
On en dit autant de certaines peintures sacrées, faites sur les murs des temples
chrétiens. Elles s'animaient tout à coup et faisaient des prodiges réels.
Evidemment, la volonté de l'homme savant, initié aux mystères du grand art
magique, peut mieux et plus sûrement que l'aventure fortuite.
Les mages et les sorciers des siècles écoulés le savaient, et ils étudièrent ce
problème à fond.
Ils enseignent, dans leurs écrits retrouvés, qu'une peinture à l'huile de pavot,
dans un encadrement doré, donne des résultats étonnants, parce que l'huile de
pavot est un excellent condensateur de fluides et le cadre doré un isolateur
parfait.
Fixé au mur d'une église, où s'agenouille souvent un peuple croyant, ou accroché
sur la tenture de soie d'un salon, où s'exaltent des rêves et des passions
violentes, une œuvre artistique devient, peu à peu, un centre de vie véritable,
parce que l'huile retient les fluide humains et le cadre doré en empêche la
fuite.
Nous n'ignorons pas, comme chacun des charlatans et d'autres hommes de mauvaise
foi ont profité de cette vérité avérée pour gagner honteusement de l'argent, en
trompant des clients trop crédules ; mais ce qui est vrai reste tel néanmoins.
Nous possédons, dans notre loge, plusieurs grimoires authentiques, qui traitent
abondamment ce sujet. Lorsque nous lisons ces vieilles écritures, il nous semble
parfois que l'œil vert de la véritable magie du Mâle darde sur nous son regard
terrifiant.
Nous lisons, par exemple, dans certaines recettes, qu'un mélange de couleurs,
auquel a été ajouté le sang d'un fœtus, arraché au ventre de sa mère par
l'opération de la croix, est d'une efficacité surprenante.
D'autres
recettes nous disent, qu'on donne à un tableau vivant une puissance formidable,
si l'on mélange à ses
couleurs quelques gouttes de sang d'une vierge pure, offerte après cela au
plaisir du succube.
Il y a des drogues, recommandées aux peintres, qui contiennent une charge
magnétique humaine, opérée à base de l'excitation solitaire. Leur effet est
particulièrement maléfique. La folie humaine s'en est servie, aux âges sombres,
pour perpétrer des assassinats mystérieux : un ennemi, masqué derrière la
gentillesse du cadeau offert, envoyait la mort dans le tableau succubique, et la
personne, bénéficiaire du cadeau, qui accrochait le portrait dans sa salle, en
mourait tôt après.
*
* *
La Sainte Inquisition s'est efforcée de mettre une fin à ces abus épouvantables,
en brûlant les manuscrits des mages et en persécutant les sorciers. Toute la
science magique aurait pu disparaître dans la féroce réaction du catholicisme,
mais, heureusement pour nous et pour l'avenir de l’humanité, il se trouva
toujours des philosophes, qui surent garder le secret et agir de la main
vengeresse. Ceux-là cultivèrent l’art magique pour le bon motif de la
connaissance initiatique.
C’est ainsi que l'un de nos Frères, qui vécut en Espagne, dans la première
moitié du XVIIIème siècle, a pu retrouver des manuscrits, contenant des recettes
et des conseils de haute importance.
Ce Frère consacra à ses études et recherches dix années de sa vie.
Il expérimenta consciencieusement tout ce qu'il put trouver au sujet de la
théorie et de la confection des tableaux vivants, et laissa, en mourant, à la
Fraternité E. B., un testament, qui contient de merveilleuses recettes pour la
préparation de drogues simples, mais puissantes, dont nous nous servons encore
aujourd'hui.
Au cours de sa vie laborieuse, notre Frère avait aussi construit lui-même
quelques portrait animés, dont il nous a donné la clef.
L’action magique bénéfique, qu’il savait déployer, lui attira une telle
renommée, que la foule assaillait constamment sa petite maisonnette, pour lui
demander des et des guérisons.
Ce Frère de si grand mérite mourut assassiné par des religieux fanatiques.
On lira plus bas un extrait de son testament dont nous avons supprimé seulement
quelques passages trop intimes :
Extrait du testament de notre frère Charsah
Mes longues études théoriques, concernant les tableaux vivants, sont restées
tout d'abord infructueuses.
Les rares tableaux, que j'arrivais à animer, mouraient rapidement, et les
fantômes, que je suscitais, n'avaient pas les facultés que je souhaitais.
Je variais mes modèles, j'essayais les condensateurs fluidiques les plus
puissants, mais en vain : je n'obtenais pas ce que je voulais.
Mais un jour, grâce à un hasard heureux, je pus constater que le fils d'un de
nos paysans, qui faisait tous les jours son ardente prière d’Espagnol devant une
image de la Madone, en fit involontairement son succube. J'eus alors la solution
du problème que je cherchais.
Je me redis chez le peintre qui avait fait cette image sainte et j’appris que le
modèle, qui lui avait servi pour cette peinture, était une fille galante de
force passion. Le peintre s’amusait avec elle à ses heures de repos, sur un lit
placé dans son atelier en face du chevalet.
L'artiste n’était pas riche. Pour épargner ses maigres deniers, il n’acheta pas
de toile pour ce tableau, commandé par le fils du paysan, mais le peignit sur un
carré qu’il tailla dans le drap de son lit d'amour.
Ce détail me frappa, et j’eus alors, pour la première fois, l'idée du parfum
individuel. Je m'appliquai alors à la recherche de la formule de la drogue,
selon les données des correspondances astrologiques. Ce fut une tâche difficile,
qui m'occupa pendant plusieurs mois. Je perdis beaucoup de temps à revoir des
grimoires anciens, dans lesquelles les choses essentielles se cachent dans des
flots de détails presque inutiles. Mais ayant retrouvé les trésors de cette
science antique, je n'eus pas de peine pour le reste du travail.
Bien vite je me persuadai qu’il était tout à fait inutile de se servir des
substances cornées, telles que les cheveux et les ongles, car ces débris de la
chair humaine meurent rapidement, et si l'on ne peut les remplacer au cours du
travail, toute la peine qu’on s’est donné reste vaine. Sans dire, d’ailleurs,
que pour la reconstruction de portraits anciens, ces matières ne peuvent être
trouvées, tandis que le parfum individuel peut être préparé aussi bien pour une
personne vivante que pour un personnage mort depuis longtemps.
En observant exactement toutes les règles que nous résumons plus bas, on obtient
infailliblement le fantôme que l'on veut. Si le résultat n'est pas conforme,
c'est qu'il y a eu une erreur, soit dans la formule de la drogue, soit dans les
calculs astrologiques, soit dans le dessin, ou l'expression, ou les couleurs du
tableau. Il est certain que la reconstruction d'un tableau vivant d'après le
schéma astrologique rétrograde, établi sur les données proportionnelles du
portrait, est un travail qui nécessite une grande patience. En plus de l'adresse
technique, il exige aussi un sens initiatique considérable, et ceci n'est pas un
art qu’on apprend commodément.
Nous recommandons à l'élève, qui ne serait pas assez sûr de lui-même, de se
faire aider par un psychologue.
Dans l'art de reconstruction de tableaux vivants, il faut distinguer quatre cas
différents :
a) Le portrait fait d'après un modèle vivant, dont on connaît les données
astrologiques de naissance ;
b) Le portrait fait d'après les données astrologiques, d'une personne inconnue
du passé, du présent ou du futur, d'une race déterminée ;
c) Le portrait d'une personne connue du passé ou du présent ;
d) Le portrait, ancien ou moderne, déjà fait, mais qu'il s'agit de réanimer.
Les conditions spéciales pour chacun des quatre cas mentionnés
a) 1. On cherchera d'abord le rapport des forces, résultant dans le schéma
astrologique natal, et on préparera, d'après les données obtenues, le parfum
individuel de la personne en question, et l’huile, qui servira au mélange des
couleurs. On n’oubliera pas de macérer toutes les plantes employées dans l’huile
bouillante, au moins pendant deux minutes.
2. La toile doit être de lin ou de chanvre, mais jamais de soie. Il faut la
tailler de bonnes dimensions pour un portrait de grandeur naturelle.
3. On s'occupera d'abord du fond du tableau, qui doit être de la couleur
individuelle du modèle.
4. On se servira de l'huile, préparée selon les indications du paragraphe 1,
seulement pour la peinture de la figure et des vêtements.
5. Lorsque le tableau sera sec, on répétera au dos la même figure, mais en
négatif.
6. Les contours de la figure, peinte au dos du tableau, doivent être remplis du
condensateur fluidique. Ce travail doit être exécuté à la lumière artificielle
de la couleur individuelle du modèle. A partir de ce moment on travaillera tout
le temps à cette lumière.
7. Lorsque la peinture au dos du tableau sera sèche, on la recouvrira d'une
couche vivante, préparée selon les indications données pour les miroirs
magiques.
8. L’image ainsi obtenue sera lissée sur un verre contenant de l'or ou recouvert
d'une couche d’amalgame, où l'argent sera remplacé par de l’or. On recouvrira,
ensuite, le négatif d'un tissu de soie naturelle.
9. Le tableau sera placé dans un cadre fortement doré.
b) La préparation d'un portrait animé d'une personne inconnue du passé, du
présent ou de l'avenir, d'une race déterminée et conformément aux données
astrologiques du thème natal établi, nécessite les mêmes opérations, que celles
que nous venons d'indiquer pour la préparation d'un portrait d'après un modèle
vivant, avec la seule différence que les proportions du dessin et l'expression
du visage seront trouvées d'après le schéma horoscopique, lequel indiquera
également la couleur des cheveux et des yeux, la nuance de la peau, etc.
Ce travail ne peut être accompli que par un astrologue de tout premier ordre.
Il faut, en outre, que le peintre, qui se donne une tâche de cette envergure,
soit un typologue averti, et qu'il ne se laisse influencer par aucun modèle
vivant.
Un grand artiste, un grand typologue et un grand astrologue doivent être réunis
dans la même personne pour réaliser parfaitement une œuvre de cette catégorie.
c) On entreprend la préparation d’un portrait vivant d'un personnage connu du
passé ou du présent, lorsqu'on veut s'attirer, pour soi-même et pour autrui, le
bénéfice de son influence directe.
On aura alors sous la main des images reproduisant les traits du personnage en
question, et on consultera, en outre, son schéma horoscopique natal.
Pour un personnage du passé, on établira l'horoscope rétrograde, en ayant
recours à la typologie, si les données réunies sont insuffisantes. Cette tâche
est également difficile, mais, si l'on travaille avec art et patience, on
réussit nécessairement.
Réanimer un portrait, dont la vie est éteinte, est le problème le plus difficile
de tous ceux que nous avons envisagés jusqu'ici, car, sans rien modifier à la
peinture déjà faite, il s'agit, dans ce cas, de la recharger des fluides
magnétiques humains, selon les données typoastrologiques conformes, et en
composant les éléments de la charge d'après les indications du tableau B.
Quelques conditions générales pour les quatre cas
1. Le tableau vivant, préparé selon nos méthodes, doit être accroché au mur
d'une chambre, qui lui sera spécialement consacrée et où personne n'entrera
jamais, sauf le propriétaire et la femme qui opérera avec lui.
Cette chambre sera de 86o pieds cubiques, au moins. Ses murs seront peints à
l'huile à la couleur individuelle du personnage reproduit sur la toile.
Chaque fois que le propriétaire viendra opérer devant cette image, il éclairera
la pièce à la nuance individuelle du portrait.
On aura soin de placer un divan en face du tableau, afin que l'opérateur se
trouve à son aise et puise fixer son regard sur les traits de l'image sans
fatigue inutile.
2. On placera une lampe entre le portrait et le divan.
Cette lampe, faite d'un métal correspondant astrologiquement à l’idée qui
présida à la confection du tableau, répandra dans la salle les vapeurs
nécessaires, embaumées du parfum individuel, préparé selon les données
horoscopiques du portrait. La lampe en question supportera, par conséquent, un
vase du même métal de correspondance astrologique, et on y versera de l'eau pure
et une quantité suffisante de parfum individuel.
3. La femme sera introduite dans la salle, lorsque les vapeurs, en nuages légers
et aromatiques, auront suffisamment rempli l'atmosphère de la pièce pour la
protéger du magnétisme, peut-être contraire, de la femme.
On opérera avec cette femme l'amour sexuel magique, en s'imaginant vivement
l'animation graduelle du portrait, jusqu'à sa vitalisation complète.
On n'en détournera pas les yeux jusqu'à la fin de l'opération.
4. Si vous vous conformez strictement à tout ce que nous enseignons ici, et si
vous n'oubliez pas de parfumer, avant l'arrivée de la femme, au parfum
individuel du portrait, votre plexus solaris, la naissance de votre gorge, les
creux de vos aisselles et de vos genoux, la plante de vos pieds et les paumes de
vos mains, - vous verrez, tandis que vous serez commodément assis sur le divan à
côté de votre amante, l'air de la chambre s'obscurcir graduellement jusqu'au
noir profond. Le portrait se réveillera dans l'ombre, et le corps, peint sur la
toile, frissonnera tout à coup. Les bras et les jambes du portrait feront des
gestes incertains, comme pour s'assurer de la réalité de leur vie, puis,
lentement, la silhouette entière se détachera du cadre pour s'avancer vers vous.
Vous pouvez alors en obtenir ce que vous voulez, mais n'oubliez pas, qu'en cet
instant solennel, vous franchissez le seuil de l’Inconnu, en brisant les portes
du Mystère. Rien ne vous sera pardonné d'une faute morale commise à cette
minute, et le malheur s'acharnera après vous pendant toute votre vie, si vous
avez rallumé une force éteinte pour vous en servir charnellement. N'appelez à
vous la vie éteinte que pour en recevoir la lumière Occulte. Ce but, seul, est
béni. Le revenant vous répondra à toute question sensée, et vous renseignera, si
vous le désirez, sur ses agissements terrestres dans sa vie précédente.
Mais, mes Frères, gardez-vous des succubes et des incubes, qui reflètent vos
vices et vos désirs cachés. Ces avortons vous charmeront par leur volupté
puissante et efficace, mais vous en deviendrez l'esclave irrémédiablement. Une
minute de jouissance dans les bras d'un succube est un pacte signé avec le
Diable : toute votre vie peut en être sucée en un an.
C'est votre Frère Charsah qui vous dit tout cela avant de mourir, car il a
étudié ces choses et en sait maintenant les mystères.
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