L'Initiation du Monde du Dessous
Par Robert John Stewart
Pour atteindre le Carrefour, Thomas et la Reine du Pays des Fées vont dans une montagne (en Ecosse on dit qu’il s’agit des Collines Eildon dans les Lowlands), puis traversent des rivières de sang et de larmes. Dans certaines versions de la ballade, la Reine dit que tout le sang et toutes les larmes qui coulent sur terre vont dans Monde du Dessous.
C’est d’un grand intérêt et potentiel pour celui qui cherche à comprendre et à pratiquer la magie Faery / transformation du Monde du Dessous. Voyons cela de plus près, car cela ne vient pas gratuitement dans le chant folklorique… il y a d’anciens précédents.
Les deux rivières sont décrites comme étant de sang et de larmes…du sang et de l’eau, des fluides corporels. Ils sont, bien sûr, de couleurs rouges et blanches selon l’ancestrale tradition magique, la troisième couleur traditionnelle étant le noir, ou parfois le vert.
Le texte de Thomas le Rimeur ainsi que le personnage historique de Thomas datent du 13ème siècle. Il y a un long texte poétique qui décrit le voyage dans le Monde du Dessous dans un anglais moyenâgeux que l’on attribue à Thomas. Il faut être clair, les textes historiques poétiques et prophétiques de Thomas Earlston, Lord Learmont, ne sont pas des ballades folkloriques traditionnelles décrivant l’Initiation au Monde du Dessous par la Reine de Féerie. De tels textes folkloriques ont été préservés dans la tradition orale écossaise jusqu’au 20ème siècle, avec d’autres textes de Thomas. Ils ont été chantés et racontés par des personnes qui n'avaient aucune connaissance de la littérature médiévale, et qui souvent ne savaient ni lire ni écrire. D'une façon ou d'une autre, une tradition initiale orale et anonyme a survécu loin de la littérature, même si elle reste attachée, de manière significative, à une personne historique.
On retrouve, bien sûr, les rivières rouges et blanches dans d'autres sources. Si nous retournons au 12ème siècle, nous trouvons ces pouvoirs rouges et blancs décrits dans un autre texte de base inestimable, les Prophéties Galloises (bardiques) de Merlin, traduites en latin par Geoffrey de Monmouth, mais venant de la tradition orale galloise. Le jeune Merlin (pas le vieil homme sage, qui est un produit de fiction contemporain) a la vision de deux dragons, Rouges et Blancs. Ils sont dans un lac caché dans une caverne au-dessous d'une montagne et se battent. Le jeune Merlin (en pleurant des larmes de prophétie) verra dans la puissance de leur interaction l'histoire future de la Grande-Bretagne qu’il racontera ensuite. Cela se termine par une vision cosmique apocalyptique qui semble se référer au premier tiers de ce siècle, le 21ème. (Rappelez-vous de mettre un post-it sur votre écran d’ordinateur…l’apocalypse est pour bientôt!).
En mettant de côté les Prophéties dont j’ai parlé dans « Merlin, The Prophetic Vision and Mystic Life », ce qui est important pour nous ici ce sont les Dragons Rouges et Blancs. Ils incarnent l'interaction, la polarité et les pouvoirs qui viennent du Monde du Dessous, et qui arrivent à la surface, provoquant ainsi des changements.
Nous sentons un lien avec les Rivières de Sang et de Larmes, les couleurs rouge et blanche, la polarité peut-être, mais qu'elle est-elle ?
Pour trouver la réponse plongeons-nous dans un texte bien plus ancien « la République » de Platon. On y trouve une des descriptions initiatiques et métaphysiques les plus significatives de la tradition spirituelle Occidentale. On l’appelle souvent la légende d'Er l'Arménien, ou Er fils d'Arminius. Er meurt, ou semble mourir, et au moment où son corps est sur le point d'être brûlé, il se réveille et parle à tous de ses expériences dans les royaumes entre la mort et la renaissance. C'est un texte remarquable et honte à vous si vous ne l'avez pas lu et s’il ne vous a pas fait réfléchir! A côté de cela, il décrit aussi, les orbites proportionnelles des planètes d’une manière si exacte que Kepler (1571-1630) s’en est servi pour ses calculs astronomiques. Mais ce n’est pas cela qui nous intéresse ici.
Platon décrit deux courants d'âmes, un courant venant des étoiles, un autre venant de la Terre. Ils passent par Monde du Dessous et ils s’y croisent à l'entrée de certaines cavernes, où ils dialoguent entre eux. Un flot ascendant d'âmes (aujourd'hui nous dirions de conscience) et un flot descendant.
Nous avons donc : des rivières de sang et de larmes dans des collines creuses (dans la tradition folklorique féerique), des dragons rouges et blancs dans la montagne creuse de Dinas Emrys (selon la tradition bardique galloise) et les rivières montantes et descendantes des âmes qui passent par le Monde du Dessous et vont vers le cosmos, dans le texte initiatique de Platon, l'histoire d'Er (dans « La République »). Voilà ce qu’on trouve dans la tradition au sujet de ce que Dion Fortune nommait autrefois les courants ou vagues Involutionaires et Evolutionnaires. Ce concept se retrouve à plusieurs reprises dans les écrits de Dion Fortune ainsi que bien sûr, dans l’enseignement Rudolf Steiner. Ce concept ne vient pas de Steiner et nous devons nous souvenir que des traditions plus anciennes en parlent déjà sous diverses formes depuis des milliers d'années. Chaque génération en donne sa propre vision ou définition, mais ses racines sont profondément ancrées dans le savoir traditionnel éternel.
Un courant coule dans la planète, un autre en sort. Nous pourrions penser, en termes modernes, que ce sont les équivalents métaphysiques des forces émises entrantes et sortantes entre la Terre, le Système Solaire et le cosmos. Les traditions folkloriques affirment que nous pouvons nous initier à changement en nous, en rencontrant ces forces directement dans le Monde du Dessous. Platon affirme qu'elles sont essentielles pour les processus de mort et de renaissance et font partie d'un mouvement cosmique qui se trouve dans le système solaire.
Comme Thomas le Rimeur, ou Merlin l'enfant prophète, nous devons traverser ces deux rivières, être pénétré par la puissance de ces deux dragons et entrer dans un état de conscience modifiée. Platon décrit le chemin cosmique ou long chemin … celui des nombreux cycles de vies. Merlin décrit comment les forces créent des interactions complexes dans le monde superficiel et que nous pensons êtres « l'histoire », alors que la tradition féerique nous rappelle que le pouvoir coule dans notre sang et dans les fluides corporels. Les forces cosmiques, les interactions collectives et la sexualité et la fertilité individuelles.
Les Rivières de Sang et la Semence, Rouge et Blanche.
Le Cercle de la Pierre Sorcière Wica et Sorcellerie